LA PART DES FLAMMES

Gaëlle Nohant

562 pages

Editions Héloïse d’Ormesson, 2015 / Le Livre de Poche, janvier 2018

Incendie du Bazar de la Charité, 4 mai 1897. Une page très sombre de l’histoire de Paris est au cœur du roman de Gaëlle Nohant. Cette manifestation et le drame qui s’ensuit servent de prétexte à croiser des destins, notamment ceux de trois femmes, la duchesse Sophie d’Alençon, sœur de l’impératrice Sissi, la comtesse Violaine de Raezal, veuve affublée de beaux enfants peu sympathiques et une jeune fille, Constance d’Estingel, tourmentée entre amour mystique et amour charnel.

La duchesse voue sa vie aux pauvres, la comtesse voudrait se rendre utile pour oublier son mari bien-aimé, et Constance met fin à ses fiançailles. La personnalité très forte de la duchesse, son dévouement auprès des plus humbles lui amènent l’admiration véritable de ses proches, et sa haute naissance l’envie de courtisanes. Femme attentive aux autres, elle va s’adjoindre les deux autres pour tenir un stand lors du Bazar de la Charité, où se pressent les élites pour « aider » les plus pauvres, mais surtout pour être vues !

L’incendie dévastateur va bouleverser la vie des familles parisiennes, car de nombreuses femmes meurent ou sont marquées définitivement dans leur chair. Comment surmonter un tel drame ? « Comment ferait-on, comment vivrait-on dans le vide assourdissant des appartements, qui trouverait-on à chérir et à malmener ? » Le roman met également en lumière les lâches et les héros, et outre l’aspect purement historique, remarquablement relaté, l’auteur narre les destins croisés de ces femmes qui n’auraient peut-être pas dû se rencontrer.

Mais je souhaite aussi souligner la présence d’un homme fort attachant, Joseph, le fidèle cocher de la duchesse  et celle de Laszlo, aristocrate journaliste qui dénonce le voyeurisme de ses pairs et reste le fervent amoureux de Constance, malgré le rejet de celle-ci.

J’ai beaucoup aimé ce livre fort documenté. J’en avais lu un autre (Ce que Fanny veut, de Karine Lebert), dont une partie couvrait cette période, l’histoire du déroulement de l’incendie m’était donc familière, mais le sujet tout autre. Là où l’on suivait le destin d’une jeune femme prête à tout pour sortir de sa basse extraction, le roman de Gaëlle Nohant porte un regard critique sur la bourgeoisie et l’aristocratie de la fin du 19ème siècle, avec leurs faux-semblants, leur vilennie, le poids du patriarcat, la toute-puissance des sachants. Il met en scène ces trois femmes que l’adversité amène à prendre en main leur vie, faisant fi des règles de la sacro-sainte bienséance.

Un roman où se rejoignent plusieurs styles : le réalisme du drame, le romantisme avec deux jeunes gens pris de tourments, le suspens.

L’écriture est magnifique, les descriptions superbes, on est dans les flammes avec les protagonistes, on sent le poids des rumeurs et on vibre avec ces femmes en rupture avec leur monde.

On comprend donc pourquoi La Part des flammes a été élu prix du livre France Bleu/Page des Libraires 2015 et prix des Lecteurs du Livre de Poche 2016.

Un vrai régal.

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2 réflexions sur « LA PART DES FLAMMES »

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