La sorcière

Camilla Läckberg

700 pages

Actes Sud, 2017

Le 10 ème tome de la saga Fjällbacka, le dernier avant une pause de l’auteure dans cette série. Patrick Hedström, le policier marié à l’écrivaine Erica Falck, y est confronté avec son équipe à l’une des affaires les plus tristes de sa carrière, tandis que la jeune femme va l’aider en recueillant des informations pour son prochain livre.

Un des plus épais de tous les livres de Camilla Läckberg, une histoire très dense également, que dis-je, DES histoires, car ici trois épisodes s’entrecroisent : Elin, au XVIIème siècle, a perdu son mari et se retrouve servante chez sa sœur mariée Britta au pasteur Preben ; Stella, petite fille de quatre ans, est retrouvée assassinée près de chez elle dans la forêt. A l’époque, ses baby-sitters de 13 ans, Helen et Marie, se sont accusées du meurtre avant de se rétracter. Le policier chargé de l’enquête s’est même suicidé.

Les anciennes amies Helen et Marie ont eu à leur tour des enfants, respectivement Sam et Jessie, stigmatisés par la conduite de leur mère, rejetés par leurs camarades. La sœur de Stella, Sanna, a elle aussi une fille, Vendela.

Et aujourd’hui, trente ans plus tard, troisième épisode, une autre petite fille de quatre ans, Nea, disparaît et est retrouvée morte au même endroit que Stella.

Les soupçons se portent forcément sur Helen et Marie, mais pas seulement.

Peur de l’autre, de l’étranger notamment, ces migrants qui ont installé leur camp à proximité ne sont-ils pas responsables de la mort de la petite Nea?

Voilà qu’une preuve apparaît et les événements s’enchaînent, sans que la police puisse y avoir prise.

Un incendie, des adolescents désœuvrés et en proie au désir de vengeance.

La vie de famille de Patrick et Erica va être bien malmenée par cette douloureuse enquête, pour moi le meilleur roman de la série (juste avant l’enfant allemand et la faiseuse d’anges). Les personnages secondaires sont aussi attachants que les récurrents, l’horreur des uns côtoie l’humanité des autres.

700 pages qu’on ne voit pas passer tant il y a de rebondissements, même si on peut soupçonner certains personnages, la fin est soignée et à la hauteur de l’ensemble du roman. Les sujets très prégnant des préjugés et du harcèlement sont abordés ici sous différents angles, qui ne peuvent qu’émouvoir.

Un excellent polar.

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Petite Princesse

Frances Hodgson Burnett

202 pages

Pocket Junior 1995 (1950, éditions G. P.)

Ce n’est pas du tout un livre de la rentrée littéraire. C’est un livre qui a attiré mon œil à une vente de la Ressourcerie car le nom de l’auteure me disait quelque chose. Et en effet, Frances Hodgson Burnett a écrit Le petit Lord Fauntleroy, dont l’histoire m’a émue lors de ma prime jeunesse.

Alors, Petite Princesse devait être une valeur sûre.

J’étais loin de me douter de la suite. Ce n’est qu’en commençant la lecture que j’ai compris : Petite Princesse, c’est Princesse Sara, la gentille petite fille très riche confiée à un pensionnat anglais par son papa reparti aux Indes, et qui devient la servante de l’institution quand la directrice apprend la mort dudit papa.

Voilà, le dessin animé des années 1980 avec Sara la « mignonne petite fille », la servante Becky et la méchante Lavinia, était en fait tiré d’un ouvrage paru en 1887, définitivement terminé après son adaptation au théâtre en 1905.

Shirley Temple a même joué ce rôle en 1939 dans le film de Walter Lang, dont la fin diffère du roman.

Alors j’ai pris plaisir à lire ce court roman, en ayant dans les yeux les images du dessin animé et dans les oreilles son générique.

La fraîcheur qui s’en dégage est formidable. Et l’adaptation animée, dans mon souvenir, plutôt conforme.

Petite fille attachante pour ses compagnes à qui elle raconte des histoires merveilleuses, Sara se projette dans un univers bien à elle, ce qui lui permet, lorsque le sort s’acharne contre elle, de ne pas céder au désespoir. De sa grande chambre confortable à sa misérable et minuscule mansarde, elle parvient à s’adapter en visualisant les beautés que produit son esprit.

Cette petite fille pourrait donner des leçons de vie à bien des adultes : passant d’un statut de très riche à celui de « moins que rien », elle maintient que la capacité à être une Princesse ne saurait dépendre des biens matériels. Princesse elle est, Princesse elle restera :

« Ce serait bien facile d’être une princesse, si j’étais habillée de draps d’or ; mais c’est un bien plus grand triomphe d’en être une tout le temps, quand personne ne le sait. » Être une Princesse, c’est d’abord dans la tête!

Et de fait, Sara n’oublie pas ceux qui semblent être encore moins favorisés qu’elle, elle en prend soin à sa manière.

Une petite perle d’écriture.

Et avec cette édition enrichie, on apprend quelques informations supplémentaires sur l’auteure qui a écrit une quarantaine de romans (Chouette, d’autres découvertes en perspective… Flûte, la plupart ne sont pas traduits en français!), sur l’éducation des jeunes filles et le travail des enfants sous le règne de la Reine Victoria.

Laissez-vous prendre par la main par la Princesse Sara, elle vous fera tour à tour sourire et vous émouvoir.