La chambre des merveilles

Julien Sandrel

266 pages

Éditions Calmann-Lévy, 2018

Je voulais le lire depuis son édition, enfin chose faite! Et j’ai mis du temps à publier cette chronique, car j’avais l’impression d’écrire tout ce qui se passait dans le livre… j’ai dû procéder à des coupes sombres pour ne pas compromettre votre envie de le lire et d’en découvrir certains passages que j’ai adorés!

Quelle jolie histoire! Quelle impression de facilité pour l’auteur de se fondre dans la peau de cette mère qui se bat malgré sa peur et sa souffrance!

Car Thelma, dont le travail était devenu le centre du monde, va voir sa vie chamboulée d’une seconde à l’autre, et ses priorités de vie modifiées : son fils Louis, douze ans et demi, s’apprête à lui parler de son premier amour lorsqu’une fois de plus, le téléphone de Thelma sonne et son patron l’invective pour une présentation qu’elle doit modifier en vue d’une réunion avec « The Big Boss » le lundi. Ah oui, car on est samedi en fait… et que même le week-end, le travail de Thelma interfère avec sa vie de famille.

Alors Louis, désireux de se venger un peu de sa mère à la fois trop distraite par son travail et inquiète malgré tout de son enfant, décide de se lancer à toute vitesse sur son skateboard, casque sur les oreilles. Thelma est à quelques mètres derrière lui qui tourne le coin de la rue et c’est le drame : Louis n’a pas pu s’arrêter et un camion l’a percuté de plein fouet.

Louis est envoyé à l’hôpital, sa mère laisse tout tomber, l’enfant est dans le coma, avec quelques traumatismes, mais c’est son cerveau surtout qui est en danger.

Thelma se retrouve doublement perturbée car ses repères qui étaient auparavant son travail et son fils, dans cet ordre-là, sont complètement renversés. Elle s’enfonce dans l’alcool, et sa mère, avec laquelle elle n’entretient que de très mauvaises relations depuis l’adolescence, va néanmoins lui venir en aide et l’aider à reprendre un peu sa vie en main.

Jusqu’au jour où le médecin en charge de Louis explique à Thelma que son fils ne présente aucune amélioration et qu’il faut s’attendre à prendre une décision dans le mois qui suit.

Thelma est anéantie.

C’est alors qu’elle découvre dans la chambre de Louis un carnet, qu’elle va ouvrir presque malgré elle, car il contient le peu de vie qu’il reste de son fils. Or ce carnet dénommé « Mon carnet des merveilles » contient « la liste de toutes les expériences » que Louis aimerait « vivre avant de mourir : [ses] merveilles », ce qu’il souhaite accomplir. Thelma, impuissante face à l’immobilité de son fils, a donc la folie de prendre sa place, d’aller se filmer dans les endroits où il a décidé d’exécuter sa liste, de réaliser les défis qu’il s’était fixé, et de lui diffuser ses exploits en espérant le ramener à la vie.

Ainsi débute une espèce de course contre-la-montre entre Tokyo, Paris, Cannes, Budapest et Londres. Bref tout ce que Louis a rêvé de faire un jour, mais qui sont les désirs d’un enfant de douze ans et demi et non pas ceux d’une quarantenaire.

Ce livret est bouleversant. En alternant le récit et les réflexions de Thelma avec celles de Louis, Julien Sandrel nous embarque dans son histoire dès les premiers mots, et on ne remet pas le pied sur le quai avant d’avoir refermé la dernière page.

C’est une ode à l’amour d’une mère pour son enfant qui se meurt.

C’est une réflexion sur les priorités de cette vie qui va à cent à l’heure, qui menace les équilibres familiaux et où on est très vite plongé dans les arcanes de la soi-disant réussite professionnelle.

Mais c’est loin d’être un livre larmoyant. Il est très touchant, mais avec des moments très drôles aussi, particulièrement celui de l’entreprise, caricature machiste et sexiste pour laquelle Thelma s’use finalement sans reconnaissance réelle. Et la liste des « merveilles » permet de placer Thelma dans des lieux et situations incongrus, pour la plus grande joie du lecteur.

Ce livre mériterait d’être offert à tous les jeunes parents, afin qu’ils n’oublient jamais l’essentiel : le temps passé avec leurs enfants… et aux autres parents aussi, et peut-être même à leurs enfants, pour qu’ils n’oublient pas de rêver!

Un très très beau moment de lecture que ce premier roman.

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Les apparences

Gillian Flynn

Texte intégral lu par Odile Cohen et Julien Chatelet

CD 1 : 9 h 32, 41 plages

CD 2 : 8 h 33, 45 plages

Audiolib, 2013 (Sonatine Éditions 2012 pour la traduction française)

Lu en marge du challenge The Black November 2018, sur plusieurs semaines…

Amy Elliot Dunn et Nick Dunn forment un très beau couple… en apparence.

Journalistes et écrivains à New York, ayant tous deux perdus leur emploi à cause de la crise, ils doivent trouver refuge dans la ville natale de Nick, Carthrage, au bord du Mississipi.

Nick y ouvre un bar avec sa sœur jumelle et tout semble normal jusqu’au jour du cinquième anniversaire de mariage : en rentrant chez lui, Nick retrouve sa maison sans dessus dessous, du sang dans la cuisine et sa femme a disparu.

S’ensuit alors une enquête de police qui va mener Nick aux confins de la folie.

Le livre de poche compte 730 pages, les CD audio font 18 h, donc c’est long, très long. Trop long au début pour moi qui ai bien pensé arrêter mon écoute en chemin : trop de détails, trop d’informations qui me semblaient peu intéressantes pour l’enquête.

Oui mais. Dès qu’on passe à la deuxième partie du livre, on ne peut pas le lâcher, et là on comprend à quel point les détails précédents étaient importants.

À de nombreuses reprises je me suis dit « non ce n’est pas possible!, ça n’a pas pu arriver ainsi!!! ». En alternant le journal intime écrit par Amy et les réflexions de Nick, on obtient les points de vue très divergents de ces deux parties d’un couple qui semble finalement ne tenir qu’à l’apparence qu’il se donne.

On suit également les personnages qui gravitent autour du couple : les parents d’Amy, auteurs d’une série de livres pour enfants autour d’un personnage tiré de la vie de leur fille « L’épatante Amy », la sœur et le père de Nick, les policiers, les gens qui participent aux recherches, les médias avides de scoop.

Quelle imagination Madame Flynn! Et combien ce petit étalage de mensonges en tous genres est dégoûtant (au sens premier du terme). Tour à tour, chacun semble s’y livrer avec délectation et sans aucune honte. C’est à qui dégainera le plus vite en faisant montre du plus bel effet de sensiblerie, de fausse modestie ou de cruauté cachée.

Du dégoût semé d’admiration, de la surprise et de l’empathie, de la colère, ce livre mène à toutes sortes de ressentis… jusqu’à la fin qui m’a plus que dérangée.

Je ne m’en suis pas encore remise… Ce qui prouve que c’est un excellent roman !!!

P. S. : Il ne me reste plus qu’à visionner le film paru sous le titre original du livre Gone Girl!

Jusqu’à ce que la mort nous sépare

Lisa Gardner, traduction de Sophie Dalle

371 pages

Éditions de l’Archipel (Archipoche), 1998

Troisième semaine du challenge The Black November 2018, thriller/policier se déroulant en Amérique du Nord.

Ravie de lire le premier ouvrage écrit par Lisa Gardner, déniché en Ressourcerie.

Jim semble un homme bien sous tous rapports, un policier évidemment insoupçonnable… sauf que sa femme Tess, qu’il pensait si docile, a fini par le démasquer et réunir des preuves contre lui, car il est en fait un tueur en série. Emprisonné, il a juré de se venger, et Tess doit se préparer pour une bataille rangée face à cet homme impitoyable.

Alors elle recrute un ancien marine imbibé d’alcool, TJ, qui a renoncé à la vie suite à un drame personnel. Elle doit faire vite, car son ex-mari s’est évadé… et du fait de son expérience, il connaît toutes les ficelles de la police.

TJ et sa sœur Marion, marqués par leur enfance sous la violence de leur père, ne s’entendent pas à l’âge adulte, mais finissent par s’allier pour protéger Tess. Car outre la jeune femme, la petite Samantha, qui est aussi l’enfant de son ex-mari, est en grand danger.

Sans temps mort, on s’attache aux personnages de Tess et de TJ, qu’on apprend peu à peu à connaître, et dont on découvre les failles et le courage.

On est également horrifié de l’ingéniosité dont fait preuve le tueur implacable mais néanmoins imprégné de son rituel morbide, qu’il se doit d’accomplir.

Et on comprend tout à fait comment est né le succès de Lisa Gardner, ce premier livre en ayant entraîné bien d’autres, où elle explore les vies, les mensonges et les travers humains, jusqu’à dénicher les plus pervers des tueurs.

Baby Doll

Hollie Overton, traduction de Françoise du Sorbier

362 pages

Éditions Mazarine, 2018

Troisième semaine du challenge The Black November 2018, thriller/policier se déroulant en Amérique du Nord.

Lecture commune avec ma copine Elisabeth, blogueuse sur https://littelectureblog.wordpress.com/

Baby Doll, c’est le tendre surnom donné par Rick à sa « fille », Lily.

Sauf que Lily n’est pas sa fille, qu’il l’a enlevée huit ans auparavant et qu’il l’a séquestrée, torturée et en a eu un enfant, Sky. Lily a guetté pendant tout ce temps l’erreur qu’il commettrait, celle qui lui permettrait enfin de s’échapper et de retrouver la liberté, pour elle, mais aussi pour sa petite fille. Et le grand jour arrive enfin : Rick oublie de fermer un verrou, Lily réussit à partir avec Sky et à retrouver sa famille… ou ce qu’il en reste. Parce que oui, huit ans ont passé, et tout a changé. Même les relations de Lily avec sa jumelle Abby ont évolué, car elles sont adultes désormais, et tandis que pour Lily les jours ont été semblables, Abby a continué malgré tout d’avancer dans sa vie.

Et voilà que Rick, emprisonné après dénonciation de Lily, décide de se venger de l’affront qu’il a reçu de celle qu’il pensait avoir totalement asservie.

Et il va y arriver au-delà de ce qu’il imaginait sans doute. Mais peut-être pour le bien de la famille, finalement!

Un très bon thriller, qui démarre très vite. Les descriptions sont faites de façon qu’on visualise bien au travers des yeux de chaque personnage comment il envisage l’histoire et ses complications : Lily bien sûr, Abby sa jumelle, Eve leur mère, … et Rick.

J’ai beaucoup aimé le parti pris de faire débuter le roman à partir de la fuite de Lily, ce qui permet d’examiner toutes les étapes de reconstruction pour elle et pour sa famille, ça change de la pure enquête de recherche pour retrouver l’enfant disparue. Cela permet également d’amener des rebondissements dans l’histoire, de rendre peut-être plus touchants encore ces personnages qui doivent faire face à leurs propres psychologie et ressenti, voire leur culpabilité autour de l’enlèvement de Lily.

Je recommande très volontiers ce livre passionnant que je n’ai pu lâcher, lu d’une traite!