La Calanque de l’Aviateur

Annabelle Destombes

381 pages

Éditions Héloïse d’Ormesson, 22 août 2019

Épreuves non corrigées, rentrée littéraire septembre 2019.

Un grand merci à Babelio et aux Éditions Héloïse d’Ormesson de m’avoir permis de gagner ce livre lors du pique-nique du 30 juin 2019.

Comment décrire ce que je ressens à cette lecture ?

Le pouvoir des mots, les sons, ceux que l’on se refuse à prononcer, ceux qui jaillissent enfin et se déversent lorsque la bonde a pu sauter. La bonde qui empêchait le cœur de Leena et celui de Jeep de vivre vraiment. Leena plongée dans son mutisme, Jeep englouti dans ses addictions. Le départ d’une mère, l’abandon d’un père.

Et le roman se fait écho de leur renaissance, l’une en Normandie, l’autre à Boston. Reconstruction en parallèle mais sans le savoir, avec les sons qui leur manquaient pour vivre à nouveau, pleinement, durablement, apprivoisant le passé et tendus vers l’avenir, des projets plein la tête.

Il ne faut pas écrire l’histoire du roman. Car elle se profile au hasard des rencontres, des lettres oubliées, des chapitres qui dévoilent les peurs, les doutes, l’indicible parfois. Et puis, les racines, l’amour fou, celui qui peut vous mener à la mort, mais chuttttt…

Il faut l’explorer, ce roman, l’apprivoiser, se délecter de ses sonorités et de sa poésie, que les amoureux des mots, des livres et du jazz ne pourront qu’aimer autant que moi.

Un coup de cœur, assurément !

Citations

« Elle aime les trous dans les choses, dans la mémoire, les oublis, les imperfections. Ce qui donne à la vie ses cavités, sa véracité : un semblant d’humanité. »

« Chaque livre n’est-il pas un voyage ?

Un voyage en soi. »

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UnPur

Isabelle Desesquelles

222 pages

Éditions Belfond, 22 août 2019

Je remercie les Éditions Belfond et Babelio pour m’avoir adressé ce livre dans le cadre de la Rentrée littéraire d’automne 2019.

Il faut avoir le cœur bien accroché pour lire UnPur. Car si on y découvre l’amour fou entre une mère et ses jumeaux, le lien si particulier entre ces deux enfants, Benjamin et Julien, le pire est à venir.

Benjamin parle à son frère. Il relate son enfance jusqu’à ce jour maudit où à Venise il a été enlevé par celui qu’il nomme le Gargouilleur. Juste trois minutes d’inattention… A la sensation de poésie lumineuse apportée par leur mère si fantasque succède alors une avalanche de sombres détails.

Le lecteur assiste, impuissant, à la narration de moments qu’il ne souhaiterait pas lire. Il s’horrifie et refuse d’entendre le pire. Il assiste au combat d’un Benjamin devenu adulte contre des pulsions qu’il rejette.

J’ai eu le cœur au bord des lèvres parfois, l’envie de refermer ce livre aussi à certains moments. Car on pourrait y voir une certaine complaisance à la relation d’envies ou de faits réprouvés.

Mais je suis finalement satisfaite de l’avoir lu jusqu’au bout.

Car la vérité se dévoile dans les tous derniers instants, celle qui prend à la gorge et mettra du temps à être digérée. Car seul Benjamin peut expliquer à Julien ce qui l’a amené à rester avec son bourreau.

L’écriture d’Isabelle Desesquelles m’a accrochée, entre poésie et sordide, j’ai vu le film de cet enfant devenu un homme se projeter sur ma rétine. Je l’ai vu courir dans Venise, se ratatiner dans sa baignoire sabot, essayer de se reconstruire au Mexique, se décharger enfin de ses années de souffrance au retour dans la maison familiale.

Il va me falloir néanmoins un livre beaucoup plus léger pour me remettre de cette lecture éprouvante.

Citation

« Du temps de la rue Milady, je prenais énormément de plaisir à vivre. Je ne le savais pas. Je n’arrête pas de le savoir. »

Un sac

Solène Bakowski

279 pages

Éditions Milady, 2017

Mon premier livre de l’auteure rencontrée avec plaisir au Salon du livre de Saint-Maur en Poche en juin 2019. Ce n’est pas son préféré, m’a-t-elle confié… mais la quatrième de couverture m’intriguait.

Par où commencer ? Par ce sac à dos vert qui contient toute la finalité de l’histoire ? Surtout pas ! J’en avais deviné le contenu assez tôt, mais pas ses enjeux.

L’histoire est celle d’Anna-Marie Caravelle, dont l’enfance s’est jouée entre une mère psychiquement inaccessible et une marâtre qui la détestait « C’est bien simple, je n’étais pas née, que déjà, j’étais détestée ».

Maltraitée bien avant sa naissance, maltraitée par la vie, Anna rejetée, prise d’hallucinations, devient un monstre, la seule façon qu’elle a trouvé pour survivre : elle tue. Elle tue ceux qui nient jusqu’à son existence, elle tue ceux qui la trahissent, elle tue ceux qui lui font du mal.

L’écriture de Solène Bakowski a su me toucher, son personnage principal également, avec toutes ses failles, son impossibilité presque innée à s’en sortir malgré ses efforts : alternance de chapitres où Anna se raconte objectivement et de narration plus emphasique concernant celle qui porte ce sac si lourd « sur son épaule meurtrie et sur son cœur en décomposition ».

L’envie de vivre la tient malgré tout, et Anna croit avoir enfin trouvé un semblant de bonheur dans l’existence pourtant marginale qu’elle partage avec son Ange Blond.

Et puis c’est l’acte de trop. Celui qui mènera au dénouement, celui qui est l’objet de ce roman – un thriller pourtant – que j’ai lu la gorge nouée tout du long, les larmes coulant sur une vie aussi atroce, marquée par le désamour… Un sac.

Surface

Olivier Norek

427 pages

Éditions Michel Lafon, 2019

Un nouveau roman d’Olivier Norek c’est toujours un plaisir. Après les aventures du capitaine Coste en Seine-Saint-Denis, après avoir horrifié le lecteur avec le si réaliste Entre deux mondes, voici qu’il nous entraîne dans l’univers d’une enquêtrice.

Cette enquêtrice, c’est Noémie Chastain. Un bon job, Capitaine de police, une équipe sympa, un petit ami, tout va bien pour elle. Sauf qu’au cours d’une intervention musclée Noémie est l’objet d’une fusillade et en sort défigurée.

Alors, et malgré toute sa vaillance, tout son professionnalisme, ses supérieurs lui demandent de se mettre au vert tandis que son petit ami la quitte. Face à ces ignominies (fort réalistes mais si cruelles !), Noémie n’a pas le choix et se retrouve seule donc dans une petite bourgade de l’Aveyron, bien loin de Paris. Malgré l’accueil plutôt agréable de sa nouvelle équipe, Noémie s’ennuie dans les querelles de voisinage. Jusqu’à ce qu’une ancienne affaire non résolue de disparition d’enfants vienne modifier le cours de son existence. Et que tout s’enchaîne.

J’étais triste de ne pas retrouver le capitaine Costes. Il ne me semblait pas possible d’avoir une suite à Entre deux mondes.

Mais là cette Noémie, elle est impressionnante, avec son caractère bien trempé, ses fêlures, son humour corrosif et sa fidélité à elle-même !

Et l’enquête imaginée par Olivier Norek l’est tout autant. On est bien loin de Paris et du stress etc. On se retrouve au sein d’une campagne plutôt paisible. Pourtant, il y a de l’action, pourtant tout s’accélère, pourtant rien ne m’a fait lâcher ce livre, que j’ai lu en un après-midi, d’une traite. Et le mieux c’est que je n’avais rien vu venir.

Alors j’ai hâte de retrouver Noémie dans une prochaine enquête… et pourquoi pas,Monsieur Norek, provoquer une enquête avec la participation conjointe des capitaines Victor Coste et Noémie Chastain ? Je ne suis sans doute pas la seule à le souhaiter !