Une bouche sans personne

Gilles Marchand

260 pages

Éditions Points, 2017, Les Éditions Aux Forges de Vulcain, 2016

(Et un petit dessin en forme de dédicace de l’auteur lors du salon Livres Paris de mars 2019.)

Un café. Trois hommes, Thomas, Sam et le narrateur, dont on ne saura pas le nom. Une femme derrière son comptoir, Lisa.

Ils se connaissent depuis bientôt dix ans. Mais lui, personne ne sait vraiment qui il est derrière l’écharpe qui cache tout le bas de son visage. Sauf qu’il compte et recompte, car il est comptable.

Un café qui se renverse et le cours de l’histoire se modifie. Car l’homme solitaire, presque asocial, est interpelé gentiment sur cette vie par trop privée. Et lui dont la vie intérieure, les pensées, sont tumultueuses, va se libérer d’un lourd passé.

C’est un livre étonnant et bouleversant que propose Gilles Marchand : étonnant dans sa construction, dans les personnages qu’il fait se côtoyer, dans cette foule qui se presse, de plus en plus nombreuse, pour entendre les révélations du narrateur. Il y dévoile les moments passés auprès de son grand-père Pierre-Jean, qui l’a initié à la mise en place d’un univers onirique qui lui permet d’échapper à une réalité trop lourde à porter. Cette tendance est cependant tempérée par des réflexions très pragmatiques et drôles sur certaines habitudes quotidiennes (vous ne discuterez plus jamais avec votre boulangère sans y penser !).

Mais cet ouvrage est surtout bouleversant, car le lecteur pris dans l’histoire, sent bien que l’Histoire y est pour quelque chose… jusqu’à la révélation ultime qui fait serrer le cœur et couler les larmes.

Le narrateur est bien sûr attachant, mais au détour de son récit, il rend ses trois amis de comptoir attachants également, on aimerait aussi les connaître un peu plus : lire le manuscrit de Thomas, découvrir la sensibilité musicale de Sam, et qui se cache derrière la très souriante et avenante Lisa.

Ce livre, c’est aussi toute une atmosphère (!) qui m’a donné envie de relire Boris Vian, d’écouter les Beatles et de me poser dans un café pour y observer les autres consommateurs…

Je ne peux en dire plus sans spolier, et ce serait bien dommage. Un tout petit conseil néanmoins : si vous ne connaissez pas bien l’Histoire de cette histoire… renseignez-vous sur site internet ou sur site tout court!

Citations

« Les rats, les souris vont bien finir par arriver et je n’ai pas d’affection particulière pour les rats, les souris. Je ne les déteste pas non plus. J’ai le même type de rapport avec les rongeurs qu’avec mes collègues, même s’ils sont moins esclaves des conventions sociales. »

« Ne pas laisser de place à l’imprévu est la meilleure arme pour ne pas s’exposer, pour ne pas se poser d’inutiles questions. »

« Ne pas s’encombrer de la réalité, transformer son présent pour oublier son passé. Il m’avait expliqué que si j’estimais que le monde n’était pas assez beau et que je n’étais pas en mesure de le changer, personne ne pourrait jamais m’empêcher de l’imaginer tel que je voudrais qu’il soit. »

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Mygale

Thierry Jonquet

158 pages

Folio Policier, 1995 (édition révisée par l’auteur), Éditions Gallimard, 1984

Un chirurgien plasticien, le docteur Richard Lafargue, une femme dénommée Eve, qui lui semble assujettie.

Un braqueur-loser, Alex, blessé et qui doit se cacher pour échapper à la police.

Une jeune femme, au comportement irrépressible, cloîtrée dans une clinique psychiatrique.

Un jeune homme, kidnappé et séquestré.

Tous ces personnages ont un lien, oui mais lequel ?

Le lecteur fait leur connaissance au fil des chapitres de ce court thriller dans lequel la violence est omniprésente, quelle que soit la forme qu’elle revêt. Il est étonnant de constater la force de l’auteur qui m’a laissée m’embarquer dans l’alternance de ces histoires où la lenteur est de mise. Le lecteur-voyeur découvre en effet la vie de chacun par son propre prisme, et une sorte de pesanteur s’abat sur lui, jusqu’à être horrifié de ce qu’il apprend : mais il est tenu par les tripes et ne saurait s’arrêter en si bon (mauvais) chemin.

Et le pire, c’est l’ambivalence des sentiments éprouvés au fil de cette lecture : tour à tour empathie, colère, horreur modifient la vision que le lecteur se fait de tel ou tel personnage…

Voici un livre dont je suis ressortie encore imprégnée du malaise de cette sensation de juxtaposition de huis-clos, où le mal côtoie le mal sans distinction.

Une puissance d’écriture qui a inspiré le film de Luis Bunuel La Piél que habito, même si le synopsis en est quelque peu différent de celui du livre. Mais pour m’être imprégnée des situations grâce aux descriptions des personnages dans leur décor, je ne suis pas sûre de vouloir voir le film… malgré la présence d’Antonio Banderas!

Bilan été : juillet/août 2019

Allez, je me remets aux bilans !

Et cet été fut propice aux belles découvertes, grâce à quinze jours de congés et quelques nuits blanches…

Et suivre le challenge #payetonslip du groupe #Ilestbiencelivre m’a également incitée à lire un peu plus que prévu.

J’ai emprunté seulement 3 livres, donc ma PAL a beaucoup baissé, ouf !

Alors du vieux, du récent, de la rentrée littéraire, voici par catégorie (avec date de fin de lecture) les 32 livres dont je me suis délectée. En finissant d’élaborer cette liste, il me semble que je suis une grande adepte de polars et thrillers, non ? 🤣

La majorité des chroniques sont déjà publiées, j’espère que cela vous donnera envie de franchir le pas, et de découvrir ces ouvrages.

Policier/thriller

  • Derniers adieux, Lisa Gardner (3/7)
  • Réveille-toi, François-Xavier Dillard (6/7)
  • Un sac, Hélène Bakowski (11/7)
  • Le miroir des âmes, Nicolas Feuz (13/7)
  • Chimaeris, Éric Tourville (15/7)
  • Sorry, Zoran Drvenkar (18/7)
  • Lumière noire, Lisa Gardner (20/7)
  • Ils étaient cinq, Sandrine Destombes (3/8)
  • Le murmure de l’ogre, Valentin Musso (8/8)
  • Surface, Olivier Norek (9/8)
  • Une vengeance au goût amer, Ann Rule (12/8)
  • Thérapie, Sébastien Spitzec (12/8)
  • La nuit des chauves-souris, Jeff Rovin (14/8)
  • La reine de la Baltique, Viveca Sten (17/8)
  • Interception, Dick Wolf (21/8)
  • L’ombre du renard, Nicolas Feuz (22/8) Rentrée Littéraire
  • Le Collier Miraculeux, Martha Grimes (29/8)
  • Mygale, Thierry Jonquet (29/8)

Drame

  • L’éveil, Line Papin (7/7)
  • La Calanque de l’Aviateur, Annabelle Combes (5/8) Rentrée Littéraire
  • UnPur, Isabelle Desesquelles (9/8) Rentrée Littéraire
  • Le chien de Shrödinger, Martin Dumont (24/8)
  • Une bouche sans personne, Gilles Marchand (31/8)

Romance

  • Belgravia, Julian Fellowes (21/7)

Histoire

  • Hong-Kong Gang, Ma Kafai (11/8)

Humour

  • La cerise sur le gâteau, Aurélie Valognes (8/7)

Jeunesse

  • Comment disparaître, Sharon Huss Roat (28/7)

Document

  • Les jeunes femmes de 50 ans, Mylène Desclaux (31/07)

Biographie

  • Je viens de si loin, Frédéric Chau (21/7)
  • Vaut-il mieux être toute petite ou abandonné à la naissance ? Mimie Mathy et Gilles Legardinier (15/8)

Non classé

  • Ceinture, Rétro, Clignotant, Dorthe Nors (14/7)
  • Vox, Christina Dalcher (20/7)