Le Guide Mondial des Records

Scénario Tonino Benacquista

Dessins Nicolas Barral

64 Pages

Dargaud, 2017

Fin de lecture 2 février 2020

Un roman graphique qui se lit très vite, mais qui fait réfléchir très longtemps.

Paul Baron, le personnage principal, est un homme simple et sans histoire. Jusqu’au jour où il se retrouve traqué à cause de son métier : il est huissier homologateur des « records humains » au Guide Mondial des Records.

Chaque jour, Paul reçoit ainsi des dizaines de lettres et de courriels de personnes qui prétendent avoir établi un record – souvent absurde ! – dans un domaine ou un autre. Et lorsque l’une d’entre elles se voit refuser l’inscription au Guide, cela amène une telle désillusion qu’elle persévère toujours et encore pour « obtenir les trois lignes » qui feront enfin sa gloire. Mais là, un individu a décidé de tuer le maximum de personnes pour engendrer un record personnel digne du Guide.

Paul doit donc absolument se protéger. Et cela l’amène à réfléchir – et à faire réfléchir le lecteur – en profondeur sur ce qui fonde son métier : la réussite à tout prix, l’heure de gloire, …

Le paradoxe est que Paul, qui voudrait bien changer de thématique et homologuer par exemple des records animaliers, va rencontrer l’amour, faire appel à un de ses anciens recordmen, et être sauvé par… Mais chut ! À vous de découvrir ce qui lui arrive !

Si j’ai bien aimé le scénario, qui propose un personnage touchant et énormément d’humour au-delà de la réflexion, j’en ai apprécié également le visuel.

Les moments d’introspection de Paul ou de narration d’un temps qui n’est pas celui de l’histoire racontée sont ainsi identifiés par le bicolore.

Le format des cases de dessins différent d’une planche à l’autre apporte également un rythme soutenu et une certaine tension dans l’histoire (la lettre de menace par exemple), avec une mention spéciale pour le moment durant lequel Paul rêve…

Une belle découverte !

Citations

« – S’il vous recontacte, appelez-nous, mais des lettres de dingues, on en a dix par semaine.

⁃ Moi, j’en ai dix par jour ! Je suis un expert mondial en lettres de dingues ! »

« Ils ont tous un rêve, monumental, éblouissant… et moi je débarque avec mon chronomètre et mon pied à coulisse pour mesurer leur rêve… pour la plupart d’entre eux, c’est inacceptable… »

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Animal

Sandrine Collette

283 pages

Éditions Denoël, 2019

Fin de lecture 11/01/2020

C’est à un voyage dans des pays mystérieux que nous convie Sandrine Collette. Du Népal au Kamtchatka, est-il possible d’échapper à son destin ?

Qui, de l’humain ou de l’animal, est vraiment le chasseur ?

C’est l’histoire de Mara qui sauve Nun et Nin d’une mort certaine, une histoire de renaissance et de misère, celle-ci les rattrapant malheureusement bien tôt. C’est l’histoire d’un déchirement, d’un sacrifice.

C’est bien plus tard l’histoire d’une jeune femme, Lior, obsédée par la traque d’un animal, qu’on découvre par le prisme de l’amour de son mari Henri, qui l’accompagne malgré son dégoût.

Tour à tour dans la peau de l’ours et dans celle de l’humain, le lecteur éprouve l’angoisse de la proie, l’excitation du chasseur, les odeurs, les sensations. Et la peur de la proie qui a survécu et qui revivra maintes et maintes fois ces moments où elle a failli y laisser, littéralement, sa peau.

C’est aussi l’histoire de personnages solitaires qui s’essayent à survivre, emplis des souvenirs de temps révolus.

J’ai aimé ce livre, mais j’ai voulu le finir assez rapidement car j’en avais compris trop vite le dénouement.

Si ce n’est pas un coup de cœur comme les précédents ouvrages que j’ai lus de l’autrice, j’y ai retrouvé sa magnifique écriture qui crée une ambiance si particulière que j’ai toujours du mal à passer ensuite à une autre lecture…

Citations

« Aucun d’eux ne voit plus le paysage, la lumière d’une beauté indicible sur les forêts qui muent, les ronds d’eau creusés à même la roche des volcans, les étranges sifflements des geysers cachés derrière ; juste ils marchent. Les arbres, les coulées de lave figée, parfois une trouée sur la vallée qui leur couperait le souffle s’ils avaient le temps, si leur esprit n’était pas accaparé par ce qui se passe devant eux et dont ils sont exclus tels mauvais élèves. »

« Le destin, ça tourne dans n’importe quel sens.

Le destin, cela vous endort comme si tout allait bien – pour mieux vous surprendre ensuite. »