Place Royale

Jacqueline Duchêne

221 pages

Éditions Jean-Claude Lattès, 2003

Fin de lecture le 12 septembre 2021.

Chiné en boîte à livres, ce roman historique relate la vie – très courte – de Marie de Coulanges, mère de la future Mme de Sévigné.

Sous Louis XIII, on ne badine pas avec les alliances : les épousailles ne sont possibles qu’entre gens de même rang, même si l’on tolère que quelques parvenus puissent représenter un parti acceptable, pourvu qu’ils aient de l’argent.

C’est le cas de Marie de Coulanges, vingt ans, qui se voit proposer d’épouser le comte Celse-Bénigne de Rabutin-Chantal, un nobliau criblé de dettes.

M. de Coulanges, financier ayant réussi à faire oublier ses rustres origines, et richement établi Place Royale à Paris, n’en est pas moins furieux lorsqu’il comprend que sa fille ne sera jamais vraiment admise dans la famille de son gendre, alors qu’il s’apprête à lui offrir le gîte et le couvert.

La jeune fille est attirée par son prétendant, malgré la froideur de sa future belle-mère, devenue fondatrice de l’ordre religieux de la Visitation après son veuvage (qui sera canonisée au siècle suivant…), qui l’ignorera toute sa vie, souhaitant surtout caser son fils.

Car Marie l’ignore, son futur époux, joueur et paresseux, participe aux redoutables duels interdits par le roi.

Quelques temps avant le mariage, le meilleur ami de Celse-Bénigne, Jean de Toiras, fait la connaissance de Marie et en tombe follement amoureux.

« Cette fille l’a ébloui, il la désire, mais elle ne lui est pas destinée. Il n’est pas assez mesquin pour trahir Celse-Bénigne, raconter devant sa future belle-famille ses manquements au service et la fureur du Grand Chambellan. Il ne gâchera pas son avenir. »

Mais respectueux de la parole donnée, il ne s’en ouvre pas à Marie. De son côté, la jeune femme a bien ressenti un coup de cœur, mais toute à son bonheur conjugal, elle l’oublie.

Le mariage ne modifie malheureusement pas durablement les habitudes de joueur, de bretteur… et de coureur de jupons de Celse. Ce qui amène Marie et Jean à se rapprocher, de façon épistolaire dans un premier temps, puis plus intimement à la mort de Celse.

« Chacun de son côté, ils ont rêvé leur amour, ils l’ont espéré, ils ont jugé impossible, ils l’ont cru mort, ils l’ont senti renaître, ils ont eu peur pour lui. »

Ils sont libres désormais de le vivre, cet amour, car il est célibataire et elle est veuve.

Mais ce n’est facile que sur le papier.

Jacqueline Duchêne trace l’histoire d’une jeune femme douce au milieu d’un monde brutal. Car il ne fait pas bon pour une femme de vivre au dix-septième siècle. Les relations filiales, matrimoniales, sociales, amoureuses sont soumises au pouvoir du rang de naissance, de la religion, de l’argent et… du qu’en-dira-t-on. Même veuve, la charmante Marie ne pourra accéder à la demande en mariage de Toiras, sous peine de se voir retirer sa fille.

Une vie qui s’achèvera à trente ans.

On y trouve aussi la notion d’honneur et de fidélité à l’amitié donnée qui caractérise Jean de Toiras, qui préférera s’éloigner de celle qu’il aime pour ne pas succomber tant qu’elle est mariée, et s’exilera pour combattre hors de France lorsque Marie le rejettera. Un énorme gâchis pour ces deux êtres qui s’aimaient passionnément…

Ayant lu la correspondance de la marquise de Sévigné durant mon adolescence, j’ai trouvé intéressant (mais si triste) de revenir sur les traces de sa mère, même au travers d’un roman.

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