De l’or et des larmes

Isabelle Villain

256 pages

Taurnada Éditions, 2022

Fin de lecture 9 janvier 2022

Un polar dans le milieu du sport et à six mois des Jeux Olympiques de Paris 2024 ? J’ai tout de suite dit oui pour recevoir ce service presse et je remercie les éditions Taurnada pour m’avoir permis de découvrir le tout nouveau roman d’Isabelle Villain en version numérique.

Polar de science-fiction proche puisqu’il se déroule entre décembre 2023 et août 2024, De l’or et des larmes ancre pourtant l’histoire dans la vie réelle des athlètes de haut niveau et des policiers chargés d’une enquête dans ce milieu.

Car le grand coach sportif Jean-Luc Provost, qui mène la vie dure à ses gymnastes, vient de trouver la mort dans un accident de voiture. Sa femme Rita, associée et kiné du centre de formation, les jeunes athlètes Capucine, Victoire, Aurore, Augustin, Tristan, et Thomas et leurs familles sont bouleversés. Il ne faudrait pas que tous les efforts consentis par ces futurs champions soient anéantis…

« La compétition, c’est une poussée d’adrénaline incroyable et impossible à décrire. Une fois que vous y avez goûté, vous ne pouvez plus vous en passer. »

Un autre coach, envoyé par la Fédération, vient reprendre en main l’entraînement.

Mais les choses se compliquent quand la police est saisie : l’accident de Jean-Luc Provost était en fait un meurtre.

Qui avait donc intérêt à le tuer ? Le commandant Rebecca de Lost et son équipe sont chargés de régler très vite cette histoire qui risque de porter préjudice économique et médiatique à l’organisation des JO. Interrogatoires, perquisitions, la routine. Mais qui permet de dévoiler le pire…

Voici une plongée très documentée dans l’univers impitoyable du sport de haut-niveau. L’or, c’est l’objectif, la souffrance et les larmes, le quotidien.

« Ces gamins sont soumis à une pression de dingue. Le monde de la gym est donc extrêmement dur, favorisé par l’autarcie, l’omerta et la recherche de la performance. »

Mais les jeunes athlètes sont-ils vraiment prêts à tout ?

Il n’y a pas de temps mort, on entre très facilement dans l’histoire et l’équipe de police menée par Rebecca est attachante. Les liens quasi maternels de la commandante avec ses subordonnés montrent l’intérêt qu’elle leur porte (malgré quelques redites) et au-delà l’enjeu pour elle de conserver ses collègues au meilleur de leurs conditions physiques et mentales pour mener à bien les enquêtes qui leur sont confiées.

L’écriture est très efficace et les thématiques traitées offrent un moment de lecture particulièrement proche -malheureusement – de l’actualité. La violence, la pression, des méthodes illégales et constitutives de conséquences graves voire mortelles pour les jeunes athlètes.

Un bon polar, presque un documentaire…

P S : Chose très étrange, ce livre a fait écho à un autre lu en 2021 dont je remets le lien ici: FACE AUX INCONNUS Quand la première impression n’est pas la bonne, puisqu’y est évoquée à plusieurs reprises une des figures du sport américain dont fait mention Isabelle Villain.

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La dame blanche

Denis Zott

445 pages

Hugo Poche, 2022

Fin de lecture 9 janvier 2022.

Je remercie les Éditions Hugo Poche, collection Suspense, pour m’avoir adressé cet ouvrage dans le cadre d’un service presse.

Quel mystère autour de la Dame blanche !

Alors que le livre débute par les préparatifs de son enlèvement dans un manoir de l’Yonne, cette jeune femme reste une énigme quasiment jusqu’aux dernières pages.

Car le rapt se termine mal : un petit accro dans le parcours, un simple accident qui permet à la Dame de s’échapper, et c’est tout un village du Tarn qui est mis à feu et à sang – littéralement !

D’énormes moyens sont mis en œuvre pour la retrouver.

Les rivalités entre le puissant maire du village Charles Baron et l’horrible famille Renard s’exacerbent quand l’édile lui-même se met à la recherche de celle qu’il croit à l’origine de l’accident qui pourrait coûter la vie à son petit-fils. Les Renard, hors-la-loi patentés composés de la vieille mère et de ses trois fils, plus vilains les uns que les autres, vivent barricadés. Celui qui passe chez eux… trépasse !

Entre les deux, un homme, Césaire, souffre-douleur des Renard, piégé par eux dans son corps et son esprit, dont seule la rencontre inopinée avec la Dame

Blanche contribuera à modifier le cours de l’existence… Césaire qui porte le nom du célèbre poète auquel l’auteur rend hommage à travers l’expérience vécue par son personnage asservi, qui doit trouver la force de se libérer de l’emprise de ses bourreaux. L’asservissement pouvant également prendre des formes très différentes…

« Il ne voulait d’histoires, Césaire. Avec personne. Surtout pas avec Brice et ses frères. Surtout pas avec les chasseurs qui hantaient ses nuits. Dans ses cauchemars, il entendait la meute des chiens, on sonnait l’hallali, et c’était lui que l’on chassait, c’était lui le gibier que l’on voulait tuer et dépecer. Avant de l’exhiber à la vue de tous. »

Les gendarmes enquêtent entre Yonne et Tarn, et le capitaine Roll y perd son code de procédure car trop de ses proches semblent impliqués dans cette affaire !

Deux mondes cohabitent dans ce livre : celui du village d’un puissant seigneur et de ses vassals, hommes de bien ou trafiquants en tous genres, et celui de la modernité et des communications avec les moyens disproportionnés déployés pour retrouver la disparue : mais qui est-ce donc ? Une célébrité ? Personne n’avait entendu parler de la Dame Blanche auparavant, mais jamais vous ne pourrez l’oublier !

C’est magistralement écrit, sans temps mort. Tout est bien embrouillé pour que le lecteur reste accroché à sa lecture, à démêler le vrai du faux, les méchants des gentils.

L’intrigue bien construite est également teintée d’humour, qui contrebalance des scènes parfois très violentes.

Mon premier roman de Denis Zott, une totale réussite !

L’accro du shopping fête Noël

Sophie Kinsella

445 pages

Belfond, 2020

Fin de lecture 10 janvier 2021.

J’avais lu les premières aventures de la série « L’accro du shopping » il y a quelques années, mais n’avais pas poursuivi. L’intérêt de participer à un club de lecteurs est de pouvoir bénéficier de conseils pour sortir de ses habitudes de lecture. Ce livre a parfaitement rempli son office !

Je me suis plongée avec bonheur dans les aventures décapantes et déjantées de Becky Brandon, née Blomwood, auprès de ses proches au moment de Noël.

Becky, qui aime le shopping mais n’est pas très adroite ou très organisée, doit préparer la fête familiale habituellement menée de main de maître par sa maman.

Listes de courses ou clavier et souris en main, notre jeune maman doit concilier le spectacle de l’école de sa fille, la recherche des cadeaux pour sa famille et ses amis, la décoration de sa maison et le menu du repas.

« Je n’ai pas fait de shopping depuis une éternité.

Rectification : je fais des courses en ligne. Mais ce n’est pas pareil. On devrait inventer un mot pour cette activité. Commander par Internet n’est pas vraiment faire du shopping. C’est acquérir. On acquiert des trucs en ligne. Mais on n’a pas l’excitation de pénétrer dans une boutique, regarder la marchandise, la toucher, ressentir de l’émotion, laisser le charme agir. »

Et tout finit par tourner de travers : ses parents changent de quartier et d’habitudes, sa sœur Jess lui semble encore plus bizarre que d’habitude, un ex petit ami revient dans sa vie, les relations entre les proches se tendent…

Becky veut en plus trouver un cadeau original pour son mari Luke. Mais cela s’avère très très compliqué. La jeune femme se démène pour parvenir à ses fins, bousculant au passage les certitudes de vieux lords décatis..

J’ai adoré cette parenthèse pleine d’humour et de vie, qui fait évidemment écho à toute planification de fête ou de grand repas. L’alternance du récit de la narratrice et de ses échanges par mail ou messages avec divers interlocuteurs donne du rythme à ce livre, au-delà des péripéties qui ne peuvent évidemment arriver qu’à Becky !

Cette héroïne est très très attachante et alors que la dénomination « accro du shopping » pourrait la cataloguer uniquement dans un rôle frivole ou ridicule, sa bonté et certaines de ses réactions m’ont particulièrement touchée.

Un bien joli et pétillant moment de lecture !

Sucre amer

Avni Doshi

293 pages

Éditions Globe, janvier 2022

Fin de lecture le 2 janvier 2022.

Je remercie les Éditions Globe pour m’avoir adressé ce premier ouvrage d’Avni Doshi, à la magnifique couverture, dans le cadre d’un service presse.

Antara, la narratrice, décrit sa relation douce-amère avec sa mère, Tara, qu’elle appelle Ma, dans une Inde encore profondément marquée par le poids des traditions.

Antara est tourmentée par les signes de maladie d’Alzheimer dont sa mère souffre très précocement.

Car Antara souhaite plus que tout que sa mère se souvienne. Elle pense qu’à présent devenue adulte, elle pourra dialoguer avec sa mère, lui demander des comptes. Et ainsi effacer les manques de cette femme-enfant qui n’a toujours recherché que son propre épanouissement, souvent au détriment de sa fille.

Le récit s’écrit au présent de la vie de couple d’Antara avec Dilip et de sa recherche artistique complexe, avec de multiples retours vers son enfance et les souvenirs de sa relation à sa mère.

On découvre ainsi que Tara, mariée jeune, n’est aucunement faite pour une vie de couple réglée par les coutumes indiennes ! L’omniprésence et l’omnipotence de sa belle-mère pèsent sur cette jeune femme qui ne rêve que de s’amuser. Elle délaisse son enfant. Mais finit par l’emmener avec elle dans un ashram où elles passeront quelques années. Là encore la fillette n’aura de cesse d’être remarquée par sa mère, amourachée du gourou. C’est cependant une autre femme, Kali Mata, qui lui servira de substitut maternel, sans doute plus approprié que sa génitrice. La maltraitance continue lorsque l’enfant se retrouve rudoyée dans un pensionnat catholique.

Tara ne sait pas être mère : trop absorbée par sa propre existence, son attitude nie celle de sa fille, jusque dans ses recherches artistiques. Et c’est la sourde angoisse de l’abandon, physique et émotionnel, qui prédomine le lien filial.

Alors, aujourd’hui adulte, confrontée à la maladie naissante de sa mère et à sa propre grossesse, Antara doute de ses propres choix : est-elle comme sa mère ? Quelle mère pourrait-elle devenir sans cette référence essentielle ?

La colère s’échappe enfin, l’envie de mettre fin à cette mère qui ne l’a pas entourée et dont elle doit prendre soin désormais.

« Je voudrais qu’en Inde aussi l’euthanasie soit autorisée par la loi, comme aux Pays-Bas. Pas uniquement au nom de la dignité du patient, mais au nom de toutes les personnes concernées.

Ainsi je pourrais être triste, et pas en colère. »

Les femmes et les traditions sont au cœur de ce roman : la mère, la grand-mère, la belle-mère, l’amie de toujours, la nourrice, la servante, … c’est leur place dans la cellule familiale qu’interroge l’auteure, mais aussi au sein même de la société.

Les hommes sont en effet relégués au second plan : plus ou moins absents, tel le père d’Antara, incompréhensifs, coureurs de jupons, plus intéressés par l’avis – la vie ? – de leur mère que de celui de leur femme, …

Cela peut sembler un peu caricatural, mais c’est la vision de la narratrice, forgée par son expérience et vue par le prisme de ses relations avec son entourage.

C’est le cœur serré que j’ai lu cette très belle histoire.

Les descriptions, tant des lieux de vie que des sentiments, sont très marquantes. Je me suis promenée dans les rues de Pune, sous la chaleur écrasante, j’ai dégusté le thé et les gâteaux interdits à Tara. J’ai observé les scènes de la vie quotidienne dans l’appartement de Tara et dans celui d’Antara et Dilip, les efforts de la jeune femme pour contenir sa peine et quelquefois sa rage.

J’ai ressenti la douleur de la petite fille puis la violence de l’adulte qui s’est construite dans cette quête perpétuelle de l’attention et de l’amour maternels. J’ai aussi envisagé, privilège de lectrice, la place de la mère qui ne souhaitait pas mener son existence ainsi.

Car la mère et la fille ne sont finalement pas si différentes : toutes deux souhaitent échapper à une destinée écrite par d’autres…

A travers l’histoire entre ces deux femmes, Avni Doshi pose un regard acéré sur le conformisme, la maternité, la maladie, les obligations parentales et filiales, quand, au fil du temps, elles s’inversent.

Et l’on comprend fort bien pourquoi ce livre s’est retrouvé finaliste du Booker Prize en 2020.