Térébenthine

Comme une envie de reposer la toile sur le chevalet… © CF30/4/22

Carole Fives

194 pages

Folio, 2022, Gallimard, Paris 2020

Fin de lecture 30 avril 2022.

D’abord quelques définitions sommaires.

Huile. Peinture du même nom. Produit plus ou moins pâteux qui colle et s’immisce sous les ongles, s’insinue dans les cheveux, s’accroche aux pores. Brosses et pinceaux plats, couleurs brutes ou mélangées, toile travaillée et retravaillée, remise sur le chevalet jusqu’à l’overdose.

Essence de térébenthine. Produit luxueux pour diluer l’huile, nettoyer les pinceaux, la peau et la chevelure marquée de couleurs. Avantageusement remplacée par le white-spirit par les peintres fauchés.

Les « Thérébentine » : surnom odorant donné à Luc, Lucie et la narratrice, peintres en herbe bien décidés à exercer leur art malgré sa totale remise en question au début des années 2000.

Parce que même à l’École des Beaux-arts de Lille, et surtout dans cette école, la peinture académique a vécu. Le beau n’a plus de raison d’être : « ce ne doit pas être beau, ça doit avoir du sens ! »

Tout peut alors faire sens, du moment que l’on déconstruit, que l’on détourne, que l’on choque. Pour avancer, obtenir son diplôme, il faut se faire violence et complaire aux professeurs-artistes qui leur demandent d’ « oublier la peinture ».

« (…) l’histoire de l’art du XXe siècle finissant peut tout entière se résumer à cette seule tentative : tuer la peinture par un dernier tableau, une ultime toile qui porterait un coup fatal à toutes les autres. »

Mais eux, en sous-main, envahissent les caves du bâtiment de leurs envies de beau et de leurs effluves entêtantes : résistance !

Ce sont trois années de travail que conte Carole Fives, forcément imprégnée de sa propre expérience et expertise. Trois années et plus, l’après qui conforte les doutes : artiste, quelle gageure ! Les voies divergent, la vie les happe, seul un reste fidèle à son destin : Luc. La narratrice-artiste transforme le pinceau en crayon, pour enfin traduire en mots et phrases les pensées qu’elle ne savait que dessiner…

Voici une merveilleuse plongée dans l’art, de la peinture classique à la photo en passant par la vidéo et les concepts émergents de la fin du vingtième siècle, qui questionne : comment exercer son art dans une société assaillie par le visuel ? Voire : qu’est-ce que l’art ? Vous avez quatre heures !

Pour ma part, je dirais qu’il s’agit d’une révolution… au sens physique du terme…

Amateurs d’huile, acrylique, fusain et autres techniques seront enthousiasmés à la lecture de ce court ouvrage qui rend hommage à l’art et aux artistes (hommes et femmes…), les non-initiés y trouveront de quoi enrichir leurs connaissances.

Un livre qui donne envie de retrousser ses manches et d’enfiler une blouse… ou de se rendre dans un musée !

P.S. : J’ai acquis ce livre au Festival du livre de Paris 2022, où j’ai eu le plaisir de rencontrer sa très sympathique auteure. J’aurais bien prolongé la discussion au Café des Aubrais

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4 réflexions sur « Térébenthine »

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