Histoires de rencontres

Maeve Binchy

247 pages

Presses de la Cité, 2000

Fin de lecture le 24 juin 2022

Comme une petite nostalgie, revenir vers une auteure que j’ai beaucoup aimée il y a une vingtaine d’années, qui m’a fait voyager au cœur de l’Irlande avec sa saga autour d’un joli restaurant.

J’ai donc découvert par hasard ce recueil de dix nouvelles autour des rencontres que chacun peut faire, et qui peuvent modifier le cours d’une vie.

De l’épistolaire « Voyage de retour » à « Vacances avec mon père », Maeve Binchy explore les petites failles du quotidien, les mesquineries ou les choix personnels qui ont conduit certains de ses personnages à s’oublier. Un peu de tristesse, d’humour, de désillusion, d’espoir. Tout est finement observé, disséqué, dans ces nouvelles qui donnent à réfléchir. Car c’est LA rencontre, voire même la seule observation chez autrui de ce que pourrait être sa vie qui peut amener à tout bouleverser, les amours comme les amitiés, pour le meilleur… ou pour le pire !

Voyage de retour

Gina séjourne en Irlande, pays natal de sa mère Freda. Elles échangent par courrier leurs frustrations et la jeune femme découvre les secrets de sa mère.

La valise

Échange de valises… coup classique à l’aéroport. Mais le contenu d’une valise peut parfois receler autant de secrets qu’un journal intime, au grand dam d’Annie et Alan !

Les vacances de Melle Vogel

Melle Vogel est très très efficace. Depuis toujours. Trop sans doute. Car après avoir élevé sa fratrie, elle s’est oubliée dans son emploi de gardienne d’immeuble, devenant la confidente de beaucoup, et rendant service à tous. Il est donc grans temps que Melle Vogel pense à prendre des vacances !

Ma nouvelle préférée.

La gardienne

Maura aurait dû écouter son pressentiment… accueillir une jeune femme pleine d’entrain dans un quotidien trop routinier ne pouvait engendrer que des dégâts…

Voyage organisé

Un tout petit grain de sable, d’une plage pourtant jamais fréquentée, ni par Shane, ni par Moya, va se glisser dans la parfaite organisation de leur voyage…

L’apprentissage

Quand sortir de sa classe sociale pour se hisser vers les sommets n’apporte pas pour autant le bonheur attendu…

Voyage d’affaires

Lena se meurt d’amour pour son collègue Shay qui ne la regarde pas… Un petit voyage d’affaires pourrait bien changer la donne, grâce aux bons conseils de Maggie !

La traversée

Deux familles se rencontrent et discutent sur le bateau qui les transporte d’Irlande en Angleterre… puis se séparent.

« Leurs chemins s’étant croisés par un jour ensoleillé et une mer bleue, elles bavardèrent comme le font tous les passagers d’un bateau, laissant croire aux mouettes qu’ils vont rester amis pour la vie. »

Chapeaux de femmes

Une jolie croisière, des passagers haut-en-couleurs, un commissaire de bord a priori très libre, mais dont les préjugés vont être mis en exergue…

Un peu de piment

Une petite vie bourgeoise dont certains protagonistes voudraient s’échapper, le temps d’une soirée, d’une nuit, d’un instant… mais le hasard est malicieux…

Un temps idéal

Frankie se trouve dans une situation fort inconfortable : maîtresse d’un homme marié, elle ne vit que pour leurs instants partagés. Et sa joie de le retrouver est ternie, car leur semaine de vacances prévue au soleil de Provence se mue en séjour quasi solitaire dans un hôtel isolé de l’ouest de l’Irlande. Mais l’Atlantique pourrait bien réserver des surprises !

Victor et la Saint-Valentin

Quand un homme profondément romantique est éconduit systématiquement par ses prétendantes, il perd la foi… mais pas sa gentillesse. Accompagner un vieille dame en Australie pourrait lui redonner un peu de joie… voire plus !

La croisée des chemins

Un homme, une femme. Deux cabines téléphoniques, une cabine d’avion. Deux êtres meurtris, qui échangent des banalités mais rien de profond. Education, timidité. Mais le destin pourrait bien choisir à leur place…

Vacances avec mon père

Rose observe une femme et son père à la gare Victoria. Elle se prend à penser à sa propre relation avec son père. Comme elle serait heureuse de voyager avec lui ! Et si elle le lui proposait ?

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Digital way of life

Estelle Tharreau

153 pages

Taurnada Éditions, juin 2022

Fin de lecture 13 juin 2022

Je remercie les Éditions Taurnada pour m’avoir adressé ce recueil de nouvelles en format… numérique !

D’abord un point sur la couverture : magnifique ! Elle représente parfaitement les points abordés dans ce livre, l’hyper connexion, et son influence sur notre façon de penser.

Estelle Tharreau s’est appuyée sur nombre d’articles de presse et d’études scientifiques pour montrer que ce qui pouvait sortir de son imagination n’était finalement pas si inconcevable que cela. Notre ère numérique est une formidable source de progrès technique et s’accompagne de meilleurs moyens, cependant, l’outrance pourrait bien mener l’humanité à une rétrogradation, voire sa perte.

J’ai beaucoup aimé ce recueil de nouvelles, ancrées dans notre présent mais avec une projection vers un avenir plus ou moins proche qu’il nous appartient de modeler immédiatement, s’il en est encore temps… car c’est terrifiant !

1. Pathologique

Un futur dans lequel le langage appauvri devient la norme, où les livres sont bannis au profit du tout-numérique : Milo, un jeune garçon amoureux des mots et de leur richesse, est mis au ban de la société … ça fait froid dans le dos !

« Les livres, le papier, les crayons sont des réflexes primitifs encore “normaux” à cet âge et qu’il devrait rapidement perdre. »

2. Virtualité réelle

“La liberté virtuelle… est la clé d’une réalité apaisée”, tel est le slogan de cette ville qui ne jure que par l’informatique, le codage et les masques de réalité virtuelle. Mais c’est surtout un prétexte pour commettre toutes les exactions possibles derrière la confortable et sans risque barrière virtuelle. Si celle-ci venait à tomber, que se passerait-il ? Une nouvelle très très violente.

3. Aveuglement amoureux

Un accusé, un avocat, un juré et un juge confrontés à un logiciel programmé pour délivrer un verdict sur la base de statistiques.

Quand l’algorithme rencontre la justice… la psychologie humaine n’entre plus en ligne de compte.

Pourtant, le juré s’interroge :

« Je veux juste savoir si l’aveuglement amoureux est une variable prise en compte dans votre logiciel… Après je validerai en mon âme et conscience. »

Une nouvelle pleine d’humour, mais profondément angoissante pour notre avenir. Ma préférée, sans doute parce qu’elle pousse à l’extrême l’ironie de la situation et titille mon sens de la justice.

4. Inhumains

Quand médecine et progrès se confondent, que reste-t-il de l’être humain ? Et l’abus d’un concerne-t-il tous les autres ?

Une réflexion philosophique intéressante à l’heure des fantastiques avancées scientifiques des dernières décennies.

5. Automatique

Si comme moi vous détestez le « bip » répétitif du fin de cycle de votre lave-linge ou de votre lave-vaisselle, si vous appréciez cependant quelques rappels enregistrés dans votre smartphone, alors cette nouvelle vous fera frémir : assistance oui, mais jusqu’à quel point ?

6. Éternité

Le vœu ultime : vivre éternellement. Mais oups ! Une éternité binaire, très peu pour moi !!!

7. Profil

Vérifier ce que l’on écrit ou publie sur les réseaux s’avère être une précaution primaire, mais faut-il remonter à sa plus tendre enfance ?

Où le principe de précaution est poussé à l’extrême…

8. Bouton rouge

Effacement des références versus théorie du complot : qui croire lorsque plus rien ne subsiste ?

9. Harceleuse

Quand la loi du grand nombre se heurte à la volonté d’un seul, qui gagne ?

10. La trappe

Sauver l’humanité ou ce qu’il en reste. Oui, mais à quel prix ?

Le concept de survivalisme sectaire poussé à son paroxysme.

Le sang de Manchester

Vincent Radureau

396 pages

Hugo Poche, collection Suspense, mai 2022

Fin de lecture 6 juin 2022.

Je remercie les Éditions Hugo pour m’avoir adressé cet ouvrage dans le cadre d’un service presse.

J’avais découvert Vincent Radureau en qualité d’écrivain avec Le dernier match de River Williams. J’avais aimé ce thriller qui se déroulait sur fond de sport.

Le nouvel ouvrage de l’auteur, journaliste sportif, n’y déroge pas. Mais il y développe des qualités littéraires qui m’ont permis de l’apprécier plus encore.

Bien évidemment, quand on parle de Manchester, si l’on est féru d’histoire contemporaine, on voit la deuxième ville d’Angleterre, ouvrière et profondément marquée par les années Thatcher. Mais si l’on aime le football, cela évoque l’éternelle (ou presque) rivalité entre City et United, les deux clubs ennemis de la cité mancunienne.

Bleu. City.

Rouge. United.

Deux couleurs que tout oppose, deux couleurs qui font se rassembler des supporters survoltés dans les stades, où seul compte l’envoi d’un ballon rond au fond des filets… de l’adversaire, bien sûr !

« C’était dans leur sang, c’était leur patrimoine, leur héritage, leur vie. (…) C’était ainsi : en Angleterre, on ne plaisantait pas avec la fidélité aux clubs de football. On pouvait tromper sa femme cent fois, mais pas son équipe. »

Vincent Radureau bâtit donc son roman sur l’ostracisme et la violence qui oppose les clubs et leurs spectateurs.

A une semaine du derby, finale de la League, alors que les deux formations sont à égalité de points, deux corps sont découverts lors d’un chantier situé à l’emplacement de l’ancien stade de City. Deux corps entrelacés. L’un porte un maillot bleu. L’autre un maillot rouge.

Il n’en faut pas plus pour déchaîner les foules : agitateurs de réseaux sociaux ou journalistes peu scrupuleux avides de scoop, hooligans réservés dans les stades mais actifs en dehors, la violence s’invite dans Manchester… jusqu’au décès d’un habitant.

« Ils hurlaient comme des barbares dans une lutte ancestrale, Saxons contre Vikings, Anglais contre Normand. Pourtant ils étaient bien tous de la même engeance ; ils se ressemblaient tous, ce qui rendait la scène encore plus aberrante. »

La toute nouvelle capitaine Molly Doherty, irlandaise dans une ville anglaise, doit identifier les victimes et, le cas échéant, les coupables. Secondée par ses deux lieutenants Fergus Pennycook et Stuart Summerbee, eux-mêmes supporters des équipes rivales mais sans acrimonie, Molly peut compter sur leur connaissance de la ville et du milieu sportif.

Voici une enquête haletante, en raison de l’espace-temps proposé, des allers-retours entre 2021 et le passé, nourri de refrains inoubliables (la playlist se situe en postface). L’écriture a gagné en profondeur, les descriptions transportent le lecteur tant dans la foule rieuse des badauds aux abords du stade que dans les tribunes hurlantes, tant dans les tristes maisonnettes que dans les pubs surchauffés.

L’expertise de l’auteur dans son domaine de prédilection permet de relater avec précision les côtés pile et face du monde du football : pression et doutes dans les vestiaires, antagonisme proche de la haine, dérives à l’intérieur comme à l’extérieur. Milieu populaire contre nantis, quartiers bas contre centre ville, capitaine contre capitaine, Bleus contre Rouges.

J’ai trouvé ce roman bien construit et ai été touchée par ces gamins des quartiers populaires dont la seule envie initiale était de taper dans un ballon…

Bilan de mai 2022

Un château troglodyte qui s’ouvre vers un paysage contrasté. © CF mai 2022

Une petite reprise d’envie de lire et d’enchaîner, retour au livre audio également.

Un arrêt durant quelques jours, les week-ends fériés sont propices à bouger et à moins à lire !

Essentiellement des polars et thrillers dans ma liste de ce mois de mai, mis à part le délicieux et subversif roman Les pantoufles

Requiem des ombres, David Ruiz Martin

Seul contre tous, Jeffrey Archer

Les pantoufles, Luc-Michel Fouassier

Dans les brumes de Capelans, Olivier Norek (audio)

Le sourire du Scorpion, Patrice Gain

Folie meurtrière, Leonard S. Golberg

L’horizon d’une nuit, Camilla Grebe (audio)