
Jacques Ferrandez
D’après l’œuvre d’Albert Camus, Préface de Boualem Sensal
62 pages
Gallimard jeunesse, Collection Fétiche, 2009
Fin de lecture 17 février 2023
« La Loire, le Rhône, la Garonne. » Voici ce que répètent les élèves algériens de ce maître français, qui dirige une école sur les Hauts Plateaux, au milieu de nulle part.
Il subvient aux besoins de ces enfants et leurs familles démunies et vit seul sur cette colline aride bientôt enneigée.
« Ce pays est cruel à vivre, mais je me contente du peu que j’ai… Avec mes murs crépis, mon puits et mon ravitaillement hebdomadaire, je suis un seigneur, ici… Et puis… c’est là que je suis né… Partout ailleurs, je me sens exilé…»
La guerre est présente, sans être cependant déclarée. Lui est maître d’école, se refuse à y prendre part. Un policier va cependant lui demander de remettre un présumé meurtrier indigène à la prison de la ville la plus proche. Le maître rejette fermement cette obligation qui lui est faite, mais accepte d’accueillir l’hôte inattendu. Cet homme intègre sympathise avec le prisonnier, partage son repas avec lui et au petit matin, lui remet de la nourriture et de l’argent avant de lui indiquer une route vers laquelle il pourra s’enfuir.
Mais le prisonnier prendra une toute autre décision, sans imaginer ses graves conséquences pour le maître d’école.
L’hôte est une nouvelle écrite par Albert Camus, issue du recueil L’exil et le royaume. On y retrouve tout son amour pour l’Algérie, les drames qui s’y sont joués. Dans cet écrit, il transcende les différences qui séparent les hommes pour proposer, dans un espace-temps superbe, un instant de respect et de fraternité entre deux inconnus que tout devrait opposer.
La préface de Boualem Sansal contribue à expliciter le propos et à remettre la nouvelle dans son contexte historique.
« L’homme de la colline et son hôte font le choix de la responsabilité et du respect de soi, c’est le seul chemin qui vaille. »
Jacques Ferrandez transcrit admirablement la solitude de vie sur la colline qui permet prendre du recul sur le chaos, les silences, les hésitations et la force dans des dessins d’une grande beauté. Très peu de dialogues sont nécessaires pour traduire les émotions et la beauté des êtres, l’étendue des paysages.
J’ai lu la nouvelle dans mon adolescence, l’avais oubliée, j’ai été charmée et émue par ce roman graphique qui m’en a rappelé l’intensité.