Il était une fois la guerre

Estelle Tharreau

256 pages

Taurnada Editions, 3 novembre 2022

Fin de lecture 31 octobre 2022

Je remercie les Editions Taurnada de m’avoir permis de découvrir le nouvel ouvrage d’Estelle Tharreau en version numérique dans le cadre d’un service presse.

« La mort d’un homme au terme d’une vie est une peine, celle d’un enfant massacré est un traumatisme pour l’esprit, une parcelle d’humanité qui se sépare de l’âme. Toutes les morts ne pèsent pas de la même manière sur une conscience. »

Le soldat Sébastien Braqui, conducteur de camions, va en faire l’amère expérience. Envoyé en mission ONU au Shonga, terre d’Afrique inventée par l’auteure, il se lie avec un enfant, le petit Momar. Alors même que sa propre épouse est enceinte, il doit laisser le jeune garçon au cours d’une permission. L’image de l’enfant sur le bord de la route le hantera dans sa vie civile et militaire.

Comment évoquer avec ses proches les exactions, la misère, les carnages auxquels il est confronté ? Braqui préfère se taire jusqu’à exploser de colère et faire imploser sa famille : sa femme et sa fille redoutent alors sa violence.

La psychologie du soldat, celle de sa famille sont évoquées au travers de la narration mais également de l’exposé du reporter qui couvre le conflit. La famille qui a peur, qui redoute le coup de sonnette, qui fait face au regard des voisins lorsque la mission n’est plus considérée comme utile, mais malveillante…

Car la légitimité de l’aide française est remise en question par le pouvoir local et les soldats de retour sur le sol national sont pointés du doigt… Pas d’honneurs, rentrés en catimini, honte à eux, un suivi psychologique et une aide au retour à la vie civile très insuffisants.

Estelle Tharreau narre la guerre et ses horreurs, les conséquences sur ses acteurs à la fois au sein du conflit et sur la vie des rescapés et de leur famille. On tombe avec Braqui au coeur de l’abîme…

Ce n’est pas un polar, ce n’est pas un thriller.

C’est l’histoire crue, presque un documentaire, des hommes et des femmes qui font la guerre ou tentent de maintenir la paix, de leurs familles et de l’endroit du décor dont le reste de l’humanité ne voit que l’envers. C’est aussi une critique des conditions d’accompagnement psychologique et matériel de ces soldats. Et c’est passionnant, terrible, poignant, bouleversant.

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La bombe humaine, c’est moi

Marion Du B’

203 pages

Chafouine Éditions, 2020

Fin de lecture 12 octobre 2022

Première découverte d’une auteure dont j’avais entendu parler pour son écriture acérée.

Et en effet, au travers de la vie de Noah, jeune femme un peu perdue dans sa vie, notamment sentimentale, Marion Du B’ explore les sentiments, les envies de rébellion qui peuvent émerger lorsqu’un individu estime qu’il perd le contrôle de son existence.

Il s’agit avant tout d’un roman, dans lequel Noah s’interroge sur les décisions qu’elle prend : quitter l’homme qu’elle a rejoint après une précédente rupture, quitter son emploi qui l’ennuie, sortir de ses addictions, changer de région ou de pays, régler ses problèmes d’adolescence et trouver, enfin !, l’homme qui fera son bonheur.

Sur un peu plus d’une année, on vit ses hauts et surtout ses bas, on accompagne dans sa quête une anti-héroïne à laquelle on s’attache facilement.

« Les rires qui parviennent encore à mes oreilles sont ceux des copains imaginaires issus de mes séries préférées. Quoique la « préférence » reste un sentiment que je ne suis plus sûre de connaître non plus… La peine par contre est bien présente. Son omniprésence ne laisse place à aucun espoir. Je coule, je coule. Je me noie dans cette vie que j’ai laissé se créer autour de moi, sans sourciller. »

Jusqu’au moment où elle décide de prendre son destin en main.

En filigrane, la narratrice remet en question les certitudes, invite à la réflexion sur le sens de la vie qu’on a construite, et propose de se recentrer sur les besoins qui sont propres à chaque individu, abstraction faite du regard d’autrui.

Un livre sympathique, qui se lit très vite, drôle (certaines situations sont tellement visuelles, voire… odorantes… que j’ai éclaté de rire !), mais très cru par moments.

Ce livre m’a été dédicacé par l’auteure et offert par Isabelle, encore merci !

Les Imbéciles Heureux

Charlye Ménétrier McGrath

262 pages

Pocket, 2021, Fleuve Éditions 2020

Fin de lecture 1er octobre 2022.

J’avais envie de lire un roman qui me ferait rire. Ayant rencontré Charlye Ménétrier McGrath au SMEP en juin 2022, j’avais souhaité acheter deux de ses romans, dont celui-ci, la suite des Sales Gosses qui m’avait tant amusé.

Oui mais voilà, ce roman n’est pas drôle à proprement parler. Il est profondément émouvant. Car l’autrice y met en scène des presque quadragénaires qui sont toujours amis depuis leurs années de lycée. Et qui se posent la question de réunir leur bande de potes vingt ans après. Sauf que ce projet n’aboutira jamais. À moins que la vie ne vienne leur jouer des tours, et qu’un peu de vent ne vienne faire tourner la roue du destin…

C’est donc un peu l’histoire de la chanson de Patrick Bruel que reprend l’autrice. Que deviennent ces jeunes qui formaient une bande d’amis unis dix ou vingt ans plus tôt ?

Bien sûr, certains ont gardé le contact, les liens se sont renforcés au fil du temps, des mariages, des naissances et des séparations. D’autres se sont éloignés. Certains ne sont malheureusement plus présents pour répondre à l’appel.

A l’origine de ces retrouvailles préparées, Camille, Florence et Marie. Une tragédie s’est abattue sur Florence qui la pousse à agir. Et l’enjeu est de taille : car Camille, un soir de juin a filmé sa bande d’amis, et a sollicité de chacun son opinion sur la définition du bonheur. La réunion des anciens permettrait ainsi de voir comment cette opinion a évolué…

J’ai beaucoup aimé ce livre auquel je ne m’attendais pas. Ce sont des gens ordinaires, avec des préoccupations du quotidien, des questionnements sur la vie menée au regard des rêves envisagés. Les personnages sont touchants car ils nous ressemblent. Et j’ai apprécié de retrouver certains traits et personnages des Sales Gosses, qui apportent une expérience pleine de bienveillance et d’humanité.

Une araignée dans le rétroviseur

Patricia Bouchet

63 pages

Éditions Parole (collection main de femme), 2022

Fin de lecture 24 septembre 2022

Dans un très court texte, la narratrice revisite les lieux de son enfance. Elle explore les endroits, intérieur et extérieur, les parfums, les visuels.

De façon très photographique, le lecteur est invité à parcourir ces étés joyeux entre cousins sous l’œil bienveillant de l’aïeule qui s’affairait en cuisine.

Cependant, explorer son passé peut également faire resurgir des événements enfouis. Peut-être, malgré tout, pour mieux se reconnecter au présent, renaître.

Voici un premier roman très poétique, touchant, émouvant et révoltant tout à la fois. Du soleil extérieur, on parvient au plus sombre des lieux et des faits qui s’y sont déroulés. Par les yeux de la narratrice, la légèreté se transforme en abomination et la maison résonne d’un cri silencieux.

C’est comme une invitation que nous lance l’autrice : « Venez, explorez l’endroit pour qu’enfin jaillisse la vérité. Et ensuite, fermez la porte à double tour, jetez la clé et tournez le dos à ce passé : les comptes sont réglés ! »

Un hymne à l’exploration de ce qui nous hante, à la rencontre avec soi et à la résilience.

Merci à Elisabeth pour le prêt de ce bel ouvrage !