Bienvenue à Gomorrhe

Qui donc se cache vraiment derrière le clavier ? ©CF mai 2022

Tom Chatfield

543 pages

Hugo Poche collection Suspense, 2022

Fin de lecture 19 avril 2022

Je remercie les Éditions Hugo pour m’avoir adressé cet ouvrage dans le cadre d’un service presse.

Azi est un jeune homme britannique. Mais son truc à lui, ce n’est pas de fréquenter les bars et les jeunes femmes. Non, Azi aime son abri de jardin doté de toute la technologie lui permettant de s’infiltrer dans les méandres de l’internet mondial. Son métier : hackeur. Son idéologie : mettre des bâtons dans les roues aux extrémistes de tous poils. Sans quitter son fauteuil. Et en veillant bien sûr à ne pas se faire démasquer :

« Ne jamais laisser de traces. Un hackeur n’est pas un prédateur qui parade avec sa proie dans la gueule. Un hackeur n’est personne : un fantôme dans la machine, mais dans celle d’un autre. »

Azi n’a pas d’ami. Des connaissances virtuelles seulement. La confiance est ténue sur le web : si lui déguise son identité pour de bonnes causes, il n’a aucune idée de ce qui se cache derrière les autres.

Sauf que la routine virtuelle d’Azi va se confronter de façon brutale à la vie réelle. Car une de ses correspondantes, qui se fait appeler Sigma, lui indique avoir besoin d’aide suite à des incursions audacieuses sur le très secret réseau Gomorrhe. Et que dans la foulée, une jeune femme, Anna, lui demande pour le compte d’une mystérieuse organisation d’infiltrer ce réseau, sur lequel tout s’échange. Terrorisme, prostitution, drogue, armes, enlèvements, meurtres commandités : le fond de commerce de ce darknet représente le vice et la perversion.

Alors mettre un doigt dans ce filet très protégé n’est évidemment pas sans risque. Mais Azi est mis sous pression par Anna et son organisation.

Et voilà notre jeune héros embarqué dans des aventures que son clavier n’avait pas imaginées ! Courses-poursuites en Europe, enlèvements, mensonges, trahisons, retournements de situation, tout y est. IRL – In Real Life – sans technologie de pointe à sa disposition, Azi doit trouver malgré tout le moyen de survivre… et très vite !

A travers cette histoire très bien menée, Tom Chatfield expose les risques encourus avec les nouvelles technologies et notamment les réseaux sociaux où sévissent des « amis » très malintentionnés. Il détaille les recherches effectuées par les hackeurs pour se forger une identité totalement inventée… en sommeil durant le temps voulu. Et leur patience qui fait donc froid dans le dos…

Il évoque également les ressorts psychologiques qui entraînent des humains pourtant intelligents à se jeter dans la gueule du loup :

« En créant un sentiment d’urgence qui élimine les autres choix d’action, vous engendrez une situation où votre interlocuteur n’a d’autres options que de faire ce que vous voulez qu’il fasse, même s’il a l’illusion d’avoir pris lui-même la décision. »

L’auteur spécialisé dans le digital fait montre dans ce premier roman très documenté d’une parfaite maîtrise des ressorts d’une histoire d’espionnage moderne : violence, secrets, faux-semblants et coups-bas, assaisonnés d’un certain humour « so british » bienvenu pour détendre l’atmosphère !

Un excellent thriller qui a remporté le Prix Douglas-Kennedy du meilleur thriller étranger 2020, tout à fait justifié.

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La règle du silence

David Lindsey

377 pages

Albin Michel, 2005, Le Livre de Poche, 2006

Fin de lecture 22 septembre 2021.

Il a été choisi au hasard. Pour sa fortune. Pour ce qu’il peut rapporter. 64 millions de dollars. Le piège s’est refermé sur Titus Cain, un homme d’affaires Texan. Il reste libre, mais prisonnier psychologique d’un kidnappeur très particulier. Ni la police ni le FBI ne doivent être informés. Si Titus se rebelle, ses proches, ses amis, bref les gens qu’il aime, mourront.

Oui mais voilà, Titus est décidé à ne pas se laisser faire. Il va solliciter l’aide discrète de Norlin, un officier de la CIA en retraite, qui va le présenter à un dénommé Burnes. Ensemble, ils vont se mesurer à une machination impitoyable.

« – Il faut que vous le sachiez, Titus…

(…)

⁃ Une ou deux personnes sont déjà mortes. Pas vraiment, encore, mais c’est tout comme. Il va falloir qu’il les tue pour s’assurer que vous avez bien reçu son message. Il sait que tant que vous n’aurez pas subi ce choc, vous ne comprendrez pas vraiment à qui vous avez affaire. »

Et en effet, pour l’inciter à coopérer, un premier meurtre atroce est commis… et Titus sombre dans l’horreur.

Durant quatre jours, Titus et sa femme Rita passent d’une vie paisible et rangée à l’enfer, confrontés aux pires violences qui menacent leurs propres existences et celles de leurs proches. Et ils sont obligés de faire confiance à des hommes qu’ils connaissent peu, dans un contexte qui les dépasse.

Voici un thriller haletant dont le maître-mot est le silence : il faut le garder pour éviter d’alerter les malfaiteurs, mais également parce que ce qui se trame va bien au-delà d’un simple détournement de fonds. L’histoire est assez originale. Âmes sensibles s’abstenir… amateurs d’espionnage, c’est un bon roman !

La trahison Prométhée

Robert Ludlum

Traduction de Dominique Defert

458 pages

Éditions Grasset et Fasquelle, 2001

Fin de lecture 27 janvier 2021.

Ce livre est le dernier édité du vivant de l’auteur, et si j’ai lu un certain nombre de ses ouvrages il y a une trentaine d’années, je ne me souvenais pas d’avoir lu celui-ci.

Robert Ludlum écrivait des romans d’espionnage : plus ou moins bons, mais toujours intéressants, et celui-ci n’échappe pas à la règle !

Son personnage principal, Nick Bryson, est un espion américain employé par un service très secret, le Directorat. Après

des années de bons et loyaux services durant lesquels il a maintes fois risqué sa vie, et alors que sa femme Elena l’a quitté sans préavis, Nick est remercié par son patron et mentor Ted Waller.

Devenu professeur d’université, Nick est approché par la CIA cinq ans plus tard : il apprend que le Directorat n’est pas une agence américaine, mais à la main des Russes, et toutes ses croyances s’effondrent ! Désormais accrédité par la CIA, Nick va s’employer par tous les moyens à faire tomber ses anciens employeurs.

Et c’est là que tout s’emballe : vous voulez de l’action, en voici en voilà ! Car Nick est bien évidemment poursuivi par une horde de tueurs qui souhaitent l’éliminer au plus vite. Mais notre héros ne se laisse pas faire : jouant de ses anciennes relations, de ses anciennes couvertures, il va tenter de s’approcher de la tête du réseau international qui semble projeter une nouvelle ère pour la planète, le mystérieux Prométhée.

Il faut donc lire cet ouvrage avec un certain recul pour l’apprécier : dans la vraie vie, Nick serait mort dès les premières pages ! Mais si le lecteur envisage ce héros comme ceux des films d’action aux multiples rebondissements, alors, sans aucun doute, il est ravi. Car tout est mis en œuvre pour que Nick se sorte des pires situations.

J’ajoute que même si on a des petits pressentiments sur la finalité du projet Prométhée, Robert Ludlum s’y entend pour faire tourner son héros – et par suite le lecteur – en bourrique : à qui donc peut-on se fier dans cet univers où tout le monde cache ce qu’il est vraiment ? Et j’ai trouvé intéressant de lire ce livre en ayant en tête les avancées technologiques de ces vingt dernières années… qui pourrait croire qu’un simple roman d’espionnage pouvait être aussi prédictif, à faire froid dans le dos ?

Un bon moment de lecture, divertissant.