Les 30 meilleures façons d’assassiner son mari

(Et autres meurtres conjugaux)

SEO MI-ae

167 pages

Matin Calme, 2022

Fin de lecture 29 janvier 2023

Je crois n’avoir jamais lu de livre de cette auteure, ni même de roman publié par l’éditeur, bien qu’il ne me soit évidemment pas inconnu.

Ce recueil de nouvelles comprend la première écrite par l’auteure coréenne, avant d’autres livres prestigieux. C’est son titre qui m’a intéressée, j’adhère totalement à cet humour noir.

Cinq nouvelles composent le recueil, mettant en scène des drames conjugaux et familiaux.

1. Trente façons d’assassiner son mari

Madame ne supporte plus l’ingérence de Monsieur dans toutes les actions de sa vie. Alors elle imagine bien des façons de le tuer. Et lorsque le corps de Monsieur est découvert, Madame s’accuse évidemment. Sauf que les méthodes qu’elle invoque ne correspondent pas à ce que la police a découvert…

2. Si c’est comme ça, je vais te manger

Deux enfants esseulés attendent leur mère qui doit rentrer de son travail. Soudain la soirée vire au cauchemar.

3. Un choix atroce

Ménage à trois ne fait pas bon ménage. J’ai moins aimé cette histoire.

4. Concerto pour meurtre

Quand Monsieur décide de tuer Madame… et vice-versa… c’est le destin qui a le dernier mot ! J’ai beaucoup aimé cet humour noir.

5. Une happy end, en quelque sorte

Une jeune femme qui ne sait dire non, un homme dominateur dont elle ne sait comment se dépêtrer.

« En y repensant, ce n’est pas parce qu’il lui avait plu qu’ils s’étaient mis en couple. Elle s’était retrouvée dans cette situation faute d’avoir su dire non. »

Ma nouvelle préférée, à faire lire à toutes les victimes de violences conjugales !

Les nouvelles policières content avec un certain humour des histoires au dénouement relativement convenu, sauf la dernière, mais j’ai passé un agréable moment à les lire, tant elles sont bien écrites. Les descriptions ciselées transportent le lecteur dans le cadre choisi par l’auteure pour chacune d’elles. Les protagonistes sont amenés à réfléchir calmement à leur avenir ou au contraire doivent choisir dans la seconde ce qui sauvera leur vie.

Et la thématique récurrente des liens conjugaux entachés par la routine, la haine, la jalousie et la violence ne donne pas, mais alors pas du tout, envie de se mettre en couple ! Était-ce le but de l’auteure ? A chacun de faire son propre choix… on vous aura prévenu !

Publicité

Trois chemins vers la mer

Brit Bildøen

Traduction d’Hélène Hervieu

168 pages

Delcourt Littérature, 2020

Fin de lecture 2 octobre 2020

Je remercie Delcourt Littérature pour m’avoir adressé ce magnifique livre.

Brit Bildøen décrit une femme à travers trois époques de sa vie : une époque où l’espoir est encore présent, puis celle des conséquences de l’espoir déçu, et enfin, celle de l’apaisement.

Ces trois époques dénommées « le corps », « l’Etat » et « l’exil » forment des têtes des chapitres qui narrent les actions de cette femme et de son entourage et évoquent son ressenti. Mais ce qui frappe le lecteur, c’est que les deux premières sont écrites à la troisième personne du singulier : une sorte de distanciation salutaire s’exerce entre ce corps qui souffre de ne pouvoir enfanter, cet esprit qui refuse d’accepter la sanction administrative et la femme qui va s’exercer à oublier ces épisodes pour enfin maîtriser le cours de sa vie.

Et comment ne pas comprendre que tout l’espoir placé dans l’avis de l’administration, espoir à jamais déçu, peut engendrer des gestes répréhensibles, certes, mais ô combien humains ? Qui n’a jamais rêvé de représailles face à des décisions absurdes, émanant des insensibles textes de lois et de ceux qui sont chargés de les appliquer ?

Car oui, cette femme, dont le nom est inconnu, ne peut comprendre que sa maturité l’empêche de se voir enfin confier un enfant, surtout après une aussi longue attente. Oui, après l’épuisement des recours, elle perd le contrôle d’elle-même.

Mais si ces époques sont empreintes d’une sorte d’urgence, l’apaisement est caractérisé par la lenteur de sa vie actuelle, « L’exil », partagée entre son métier de traductrice de Dany Laferrière, son bénévolat auprès d’un observatoire ornithologique et ses longues balades sur la plage avec son chien Isa.

Il s’agit d’un roman très court, mais dont la densité est telle qu’on se surprend à l’envisager bien plus épais. Tout y est d’une grande justesse : les émotions irrépressibles, le comportement irrationnel et ses conséquences, puis la peur de s’attacher, et enfin, les effets du temps et de la réflexion.

J’ai adoré ce livre. J’ai ressenti au plus profond de moi la tristesse et la colère de cette femme. Point de pathos, mais une gravité qui se dégage, une empathie – voire une compassion – pour elle, qui ne demandait rien de plus que d’aimer un enfant.

Citations

« Ce n’est pas un droit d’avoir des enfants, en revanche tout le monde a le droit de désirer en avoir. On les tient dans ses bras pendant un moment, puis ils s’éloignent, se détachent, se libèrent. Ils se rebellent, et on doit lâcher prise, ils disparaissent dans le trou noir de leur avenir. Ils emportent avec eux une part de nous, et deviennent très différents de nous. »

« C’était son mari au départ qui l’avait pisté sur Internet. Entre eux, ils l’appelaient l’Etat, tout simplement, ce qui en disait long sur leur haine à son égard. »