La voix secrète

Michaël Mention

233 pages

Éditions 10/18, 2017

Fin de lecture 16 mars 2023

Du nom de Pierre-François Lacenaire, il ne me restait qu’un vague souvenir. Après recherches sur la toile, j’ai retrouvé sa trace dans le film Les Enfants du Paradis, de Marcel Carné, que j’avais visionné il y a bien longtemps. Poursuivant mon enquête, j’ai vu que la fiche Wikipedia de Lacenaire indique pour ses activités « poète, tueur en série, écrivain, duelliste ». Diantre ! conseillée par ma bibliothécaire experte en polars, je n’avais pas imaginé rencontrer l’hydre dans le roman de Michaël Mention.

Je me suis donc transportée dans le siècle de Louis-Philippe, homme d’argent, mais surtout à son propre profit, tant la misère règne avec lui à Paris.

Fin 1835, Pierre Allard, chef de la sûreté parisienne, enquête sur des crimes d’enfants : tête coupée, déposée à un endroit bien visible, corps retrouvé quelques jours plus tard. Alors que Lacenaire est déjà emprisonné pour multiples meurtres et escroqueries (véridiques), il est suspecté pour ces assassinats en raison de leur mode opératoire, qui ressemble à ceux qu’il a commis. Sauf que Lacenaire ne s’en est jamais pris à des enfants.

Allard, qui a développé des liens d’amitié avec lui, va solliciter son concours pour résoudre l’affaire.

Ce court roman a le mérite de proposer tout à la fois une enquête policière dans un contexte historique de soulèvement de certains républicains contre la monarchie et de retracer les derniers moments de la vie de Lacenaire, inspirés de ses Mémoires écrits en prison.

On y découvre un homme complexe, érudit et imbu de lui-même, qui passe en revue les raisons de ses crimes : défavorisé par son père au profit d’un de ses frères, il a connu une vie mouvementée, fréquenté les pensionnats religieux qui l’ont entraîné vers l’athéisme. Et surtout, Lacenaire fustige les droits d’une haute société qui détient la richesse et vit confortablement tandis que le peuple, y compris les plus jeunes enfants, trime sans relâche pour quelques sous. Il attend donc son exécution avec impatience, tant il se sent mal à l’aise dans son siècle.

Cet aspect de victimisation de Lacenaire parviendrait presque à faire oublier qu’il a conclu qu’escroquer et dépouiller autrui lui a semblé plus opportun que travailler pour subvenir à ses besoins, qu’il profite de certains avantages dans sa cellule et que tuer sans vergogne ceux qui se placent en travers de ses envies est devenu une seconde nature…

Il faut avoir le cœur bien accroché pour lire les descriptions des corps décapités, des rues de Paris, de la morgue ou des Halles ! L’hygiène est absente, la puanteur est de mise. On visualise parfaitement les scènes de foule, et particulièrement celles où elle se presse, à la queue-leu-leu, pour aller identifier les corps exposés des jeunes enfants : c’est proprement sordide.

Michael Mention conjugue de manière intelligente le temps, les lieux, le contexte historique vérifié et le scénario policier qu’il invente. J’ai beaucoup apprécié et aurai plaisir à le laisser me téléporter dans d’autres époques.

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Am stram gram

M. J. Arlidge

407 pages

Éditions 10/18, 2016, Éditions Les Escales, 2015

Fin de lecture 11 janvier 2023

Ce livre a été en pointe il y a quelques années. Mais, premier d’une série, j’avais longtemps hésité à l’ouvrir car je ne suis pas très patiente… j’aime à lire rapidement la suite des aventures de personnages attachants.

Et puis, à la faveur d’une discussion, il m’a été chaudement recommandé à nouveau. Je me suis laissée tenter… et j’ai bien fait !

Southampton. Deux personnes enlevées : amants, amis, collègues, parents, peu importe. Séquestrées dans un lieu abandonné, sans nourriture ni boisson. Un pistolet déposé entre elles. Le deal ? L’une d’elles doit mourir pour que l’autre soit relâchée, une survivance physique, mais une mort psychologique. Ce marché impossible se répète, à plusieurs reprises.

« Pourquoi « elle » faisait ça ? Elle obligeait ses victimes à se livrer à un am stram gram diabolique, en sachant pertinemment que le tireur souffrirait au final beaucoup plus que la victime. »

La commandante Helen Grace, dure d’apparence pour cacher sa sensibilité, est à l’affût : trouver un lien entre ces disparitions, déterminer l’enjeu pour cette tueuse en série par procuration. Toute son équipe est mobilisée, et bientôt tous les policiers des environs. Charlie, Mark, Bridges, … La presse s’empare de l’affaire alors que rien ne doit fuiter pour éviter la panique dans la population.

C’est très bien fait. Chapitre après chapitre, les paires de victimes se succèdent, et on suit, horrifié, leur agonie et les réflexions qui amènent à la décision ultime. Les rouages de l’enquête de police sont bien décrits. A travers les différents rebondissements, la ville de Southampton et certains de ses quartiers ou bâtiments abandonnés s’inscrivent au cœur de l’histoire. Et peu à peu, Helen, la commandante aux mœurs si spéciales, se dévoile, avec toute sa part d’humanité.

Violences physiques et psychologiques marquent ce thriller. Les lieux, les événements, les comportements sont empreints de ces violences, qui perdurent bien longtemps dans les esprits après qu’elles aient cessé. Ce livre interroge la loyauté, les liens qui unissent ou déchirent les êtres. Je l’ai trouvé très fort et bien écrit, au point de vouloir poursuivre dans la foulée la lecture des enquêtes d’Helen Grace.

Mais les thèmes abordés et les descriptions pourraient heurter certaines âmes sensibles !

Dans la rue où vit celle que j’aime

Mary Higgins Clark

374 pages

Le Livre de Poche, 2003, Éditions Albin Michel, 2001

Fin de lecture 15 octobre 2022

Petit préambule

Cela faisait très longtemps que je n’avais pas ouvert un livre de cette auteure renommée. J’en avais lu deux dans les années quatre-vingt dix, et avait été gênée par la construction quasi similaire des histoires (qui ne m’ont pas marquée !). J’avais alors décidé de ne plus lire ses livres. Mais il n’est pas interdit de changer d’avis… Ma meilleure amie a nettoyé sa bibliothèque et m’a donné quelques livres dont plusieurs de Mary Higgins Clark. Alors voilà, j’ai attrapé le premier qui m’intéressait et décidé de relever le défi.

Bien m’en a pris.

L’histoire

Emily Graham, jeune et brillante avocate de New-York, achète à Spring Lake la maison de ses ancêtres dans laquelle son arrière-grande-tante Madeline a disparu en 1891.

Alors qu’elle s’installe, des corps sont retrouvés sur le terrain.

Or, l’un d’eux est celui d’une jeune disparue récemment.

Un lien est forcément fait par la police entre les disparitions à cent dix ans d’écart. D’autant que d’autres disparitions ont suivi celle de Madeline. Un copycat serait-il en action ?

La brigade du procureur composée de Tommy Duggan et Peter Walsh, ainsi qu’Emily elle-même, vont enquêter sur ces mystérieuses disparitions. Consultation d’archives, reconstitution de faits, hésitations, peur, doutes… Au fil des chapitres, les habitants de Spring Lake dévoilent leurs petits secrets.

Sans compter qu’Emily est aussi la cible d’un mystérieux prédateur qui lui envoie des photographies…

Mon avis

J’ai bien aimé la construction du livre. Dès le début, on sait qu’Emily est en danger. Cela titille la soif d’en savoir plus sur les habitants de cette charmante cité balnéaire…

On suit le cheminement des policiers et d’Emily, on s’inquiète pour elle qui a déjà dû affronter un harceleur suite à un procès. Les descriptions permettent de visualiser aisément les différents protagonistes dans leur vie quotidienne, au sein de leur habitat. L’enchevêtrement des affaires criminelles et des époques, l’attitude des différents suspects, les chapitres consacrés au meurtrier et les recherches menées dans le présent et le passé sur une dizaine de jours apportent un rythme soutenu. Cela donne envie de poursuivre sa lecture afin d’en connaître vite la résolution !

Me voici donc réconciliée avec la prolifique auteure, dont quelques livres me tendent encore leurs pages pas très loin de mon fauteuil… à suivre donc, dans quelques temps !

Plus que deux morts et c’est Noël

Claire Plantevin

253 pages

Hugo Poche Suspense, octobre 2022

Fin de lecture 28 septembre 2022.

Je remercie les éditions Hugo pour m’avoir adressé cet ouvrage dans le cadre d’un service presse.

Une autrice ou un auteur se cache derrière ce pseudonyme. Mais je n’ai pas réussi à le dénicher dans mon esprit embrumé par le rhume !

Le roman, lui, est très sympathique et accrocheur.

Dans une petite ville isolée, à quelques jours de Noël, dans le froid glacial et la neige, une brigade de gendarmerie va être mise à contribution sur des sujets très divers : la disparition de boules de Noël et d’un âne de la crèche, la découverte d’un corps par des lectrices assidues du club local, plusieurs meurtres, des livres avec des messages mystérieux et évidemment un auteur à succès retranché dans son manoir inviolable.

Les enquêtes menées en parallèle sont fort bien décrites et l’atmosphère hivernale parfaitement rendue, on s’y croirait. L’intrigue principale est bien menée et les personnages bien campés, qu’il s’agisse de suspects ou d’enquêteurs. Quelques remarques pleines d’humour contribuent à la bonne humeur qui entoure ce policier plein de suspense, que j’ai lu avec grand plaisir.

Un bon polar d’hiver, à découvrir sous la couette !