La boîte noire

Dessins : Jacques Ferrandez

Scénario : Tonino Benacquista

64 pages

Gallimard, Collection Futuropolis, 2000

Fin de lecture 11 février 2023

Un roman graphique qui porte le nom de Tonino Benacquista attire forcément mon regard. J’aime ses romans noirs et son humour particulier.

Au début de cet ouvrage réalisé avec Ferrandez, Laurent Aubier est victime d’un terrible accident de voiture. Il reste une dizaine d’heures dans le coma, et sa logorrhée, restituée dans un carnet par une infirmière attentive, constitue le ferment de la fameuse boîte noire de sa vie. Des mots, des phrases, des lieux et des événements auxquels on ne prête garde, mais qui s’impriment irrémédiablement dans notre cerveau si réceptif.

« -Janine, vous êtes en train de me dire que vous… Vous avez violé mon intimité mentale ?! …

-Laurent, je fais une psychanalyse depuis 14 ans, et en 14 ans, je n’ai pas dit la moitié de ce que vous avez fait sortir en une seule nuit…

(…) Tous vos mystères et vos oublis, tout votre amour et toute votre haine, tous vos messages restés sans écoute, toutes vos craintes, et vos fantasmes sont consignés là-dedans… Faites-en bon usage…»

Alors Laurent n’aura de cesse de retrouver de vrais souvenirs à partir des bribes implantées dans son inconscient. Jusqu’à tomber au plus bas, ingurgiter des produits illicites et perdre goût pour l’avenir, au profit du passé.

Les dessins sont explicites : à plusieurs reprises, des planches sombres occupent toute une page pour retracer les cauchemars horrifiques qui envahissent le sommeil de Laurent. C’est une véritable quête qu’engage le jeune homme pour enfin découvrir la vérité, tracée sur des planches un peu plus claires et heureuses.

J’ai aimé tant le scénario que sa traduction en images. L’obsession de Laurent Aubier et sa descente en enfer sont particulièrement bien décrites. Et le petit plus de l’ouvrage concerne la leçon qu’on peut en tirer : si nous ne savons pas, faisons confiance à notre inconscient, car lui, il sait !

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La commedia des ratés

Première et deuxième parties

Dessin et scénario Olivier Berlion

D’après Tonino Benacquista

74 et 76 pages

Dargaud, 2011

Fin de lecture 12 décembre 2022

Lire Tonino Benacquista, c’est investir un univers de personnages hauts-en-couleurs. Cette adaptation graphique très réussie d’Olivier Berlion en deux volumes n’y fait pas exception.

On entre au sein du foyer banlieusard des parents d’Antonio, jeune homme d’origine italienne, qui a tout fait pour échapper à sa famille, à son quartier d’immigrés et surtout à son grincheux de père, en s’installant à Paris.

Rattrapé par Dario, un ancien camarade, Antonio doit rédiger une lettre d’amour pour une mystérieuse femme. Dario lui confie alors ses projets d’achat d’un terrain vinicole dans le petit village de Sora, ancienne patrie de leurs parents.

Mais Dario se fait assassiner. Même s’ils n’étaient pas vraiment intimes, Antonio décide de mener l’enquête pour savoir qui a décidé ce coup de force. D’autant qu’il est devenu son héritier. Malgré des intimidations, Antonio choisit de suivre la voie de Dario en se rendant en Italie pour inspecter ce fameux terrain.

A Sora, il rencontre un vieil aveugle, une magnifique jeune femme, des mafieux, des villageois hostiles : presque tout le monde veut sa peau… ou son terrain. Ou les deux ! Antonio, lui, veut réaliser le rêve de Dario. Qui finit par devenir le sien.

Mafia, chantage, lutte d’influence, religieux corrompus, tous s’efforcent surtout de gagner de l’argent au détriment des autres. C’est donc assez violent.

L’histoire s’écrit dans les bulles comme dans les dessins : Antoine se raconte et parle fréquemment à son ami Dario comme si ce dernier était toujours vivant.

En filigrane, la Grande Histoire, celle de l’Italie au cours de la Seconde Guerre Mondiale, rejoint le destin d’Antoine. Il évoque les souvenirs racontés par son père, illustrés en sépia, plus finement que le reste des dessins des albums.

« La mémoire de tous les départs que je n’ai pas vécus remonte en moi. A commencer par celui de mon parernel… »

Tout au long, la variation du nombre et de la taille des vignettes dans les planches, ainsi que les nombreux gros plans des visages, accentuent le rythme impulsé par le scénario.

J’ai beaucoup aimé.

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Pour lire mon avis sur un autre roman graphique, scénarisé par Tonino Benacquista lui-même, cliquer sur le bouton ci-dessous