CHERUB – Mission 2 : Trafic

Texte : Robert Muchamore – Baptiste Payen

Illustrations : David Combet

128 pages

Casterman, 2017

Adapté du roman de Muchamore paru en 2007

Fin de lecture 10 février 2022

Dans ce deuxième volume de la série adapté en BD, on retrouve James dans sa deuxième mission d’infiltration pour l’organisation Cherub. Avec trois autres jeunes, Kerry, Kyle et Nicole, au sein d’un couple d’anciens de Cherub, il doit se nouer d’amitié avec des adolescents au cœur d’un trafic de drogue, pour faire tomber le patron du gang, homme d’affaires jusqu’ici inattaquable.

Le couple et leur bébé ainsi que les quatre adolescents censés avoir été adoptés investissent donc une maison à Thornton. Par le biais des enfants du trafiquant, Keith Moore, ils doivent se rapprocher de lui pour le faire tomber, par tous moyens, sauf en consommant eux-mêmes de la drogue. Sous peine d’exclusion de Cherub.

Les voici donc entraînés dans une mission à très haut risque, dans une banlieue minable.

« Personne ne s’installe à Thorthon par choix : un tiers des maisons sont vides, un tiers occupées par des étudiants fauchés, le reste par des demandeurs d’asile, des repris de justice ou des familles surendettées. »

Plus violent que le premier tome, plus incisif aussi sur des thématiques propres à mettre en garde la jeunesse, j’ai trouvé le scénario bien construit, autour du combat contre la drogue, les réseaux qui la diffusent, les ravages qu’elle entraîne et les valeurs de Cherub. La difficulté pour James et ses camarades infiltrés de mettre de côté leurs sentiments et de mentir pour mener à bien leur mission est également bien mise en exergue, adrénaline d’une part contre peur de perdre la vie d’autre part.

J’ai par contre moins aimé le dessin que pour le premier tome, le dessinateur ayant changé, j’ai eu du mal par moments à différencier les personnages les uns des autres. La qualité du papier, mate, et les couleurs moins relevées correspondent cependant à l’histoire et contribuent à l’atmosphère plus sombre du roman.

J’aurai plaisir à continuer la découverte de cette série, au fil de l’adolescence de James et ses camarades.

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Le cheptel

Céline Denjean

940 pages

Pocket, 2020, Hachette Livre(Marabout), 2018

Fin de lecture 25 avril 2021.

Difficile de chroniquer ce livre sans en divulguer trop sur l’intrigue.

Prêté par une de mes collègues, c’est le premier ouvrage que je lis de Céline Denjean, et ce ne sera pas le dernier ! Je regrette d’ailleurs de ne pas avoir lu les deux précédents, même si Le Cheptel peut se lire indépendamment, cela m’aurait permis de suivre notamment les aventures des policiers récurrents qui mènent l’enquête.

Trois récits aux normes littéraires différentes se succèdent au fil des chapitres.

Louis Barthes, un notaire en retraite, narre lui-même la quête des conditions de sa naissance, au coeur de l’occupation.

Un jeune garçon, Bruno, s’est égaré dans les montagnes pyrénéennes.

Atrimen, une jeune fille, est interpelée par l’autrice sur sa soumission à une Grande Prêtresse prête à tout pour assouvir son funeste dessein.

Ces trois histoires qui ne devraient pas se croiser se recoupent cependant lorsque le corps d’une jeune femme est découvert dans un ravin près de Nîmes. Une voiture qui pourrait avoir un lien avec le meurtre appartient à une riche famille toulousaine. Les indices recueillis sur les lieux s’accordent avec des faits connus d’un enquêteur d’Interpol, le Capitaine Merlot, relatif à une sorte d’élevage humain. L’ensemble des services centraux chargés de la sécurité et de la répression criminelle décident donc la création d’une entité spécifique pour cette enquête : la cellule TEH, pour Trafic d’êtres humains. Les brigades de gendarmerie de Nîmes et Toulouse (celle de la capitaine Eloïse Bouquet, héroïne récurrente) sont ainsi partie prenante de la cellule d’investigation TEH autour de Merlot.

Les enquêteurs doivent redoubler d’ingéniosité pour confondre les auteurs du meurtre de la jeune femme et remonter une filière de traite d’êtres humains.

« (…) Brandon démontrait que depuis la nuit des temps, les hommes n’étaient qu’une matière première comme une autre, que pouvoir et domination faisaient partie du patrimoine génétique de l’humanité, qu’il y avait toujours eu des maîtres et des esclaves et que ça ne changerait jamais. Il a conclu en parlant de la loi du plus fort ou du plus riche. »

Chacun des personnages est un héros à sa manière : le notaire en quête de son histoire, le jeune Bruno qui cherche à se dépasser, Atrimen et sa meilleure amie Élicen confrontées aux mensonges et à l’esclavage alors qu’elles se croyaient en sécurité au sein de leur communauté. Et puis ces valeureux policiers, qui risquent leur vie pour protéger des innocents ou arrêter des malfaiteurs. Les rivalités, les points d’achoppement juridiques, les horaires décalés, les deuils qu’on n’a pas le temps de faire, les relations exacerbées sont parfaitement mises en lumière dans l’ouvrage. Jusqu’à l’assaut final…

C’est excellent. C’est terrible. C’est horrible. C’est à vomir. Car alors qu’il ne s’agit ici que d’un livre, on sait que la réalité dépasse malheureusement la fiction…

3 secondes

Roslund et Hellström

Traduction Philippe Bouquet et Catherine Renaud

732 pages

Le Livre de Poche, 2020, Mazarine, 2019

Fin de lecture 17 mai 2020

Sélection 2020 Prix des lecteurs du Livre de Poche, mois de mai.

Dixième livre lu dans le cadre du jury.

3 secondes est le premier opus d’une trilogie, dont les suivants sont : 3 minutes et 3 heures, multirécompensée à l’international.

3 secondes, c’est avant tout une histoire de mensonges.

En effet, à Stockholm, Piet Hoffman est en apparence un homme ordinaire : femme, enfants, travail stable dans la sécurité.

Mais Piet est en fait un délinquant repenti, à la merci de la mafia et de la police. Il infiltre secrètement l’une au profit de l’autre, jusqu’au drame : un acheteur de drogue est tué, et un commissaire de police tenace, Ewert Grens, recherche la vérité. La couverture de Piet risque donc d’être éventée et ses donneurs d’ordre au sein de la police pourraient être mis en cause en raison de ce meurtre.

Piet s’est attaché à sa famille, il craint pour eux. Il se désole des aspects de sa vie qu’il cache à sa femme. Il souhaite tout arrêter.

Mais son contact dans la police lui demande de réaliser la dernière mission imposée par la mafia : il doit mettre la main sur le trafic de drogue au sein même d’une prison. Cependant, à peine incarcéré, les strates du pouvoir qui connaissent sa mission le laissent tomber. Identifié désormais par ses co-détenus comme un traître à la solde des autorités, il ne peut compter que sur lui-même pour s’en sortir… et 3 secondes !

J’ai beaucoup aimé ce roman à la fois lent dans sa mise en place et haletant dans sa suite, très documenté sur l’univers de la drogue et des prisons. Il conte, au-delà de la trame dramatique, le face-à-face à distance de deux hommes solitaires, Piet et Ewert, chacun préoccupé par sa survie, physique pour l’un, morale pour l’autre. On suit les pérégrinations du grincheux et teigneux commissaire, on entre dans sa tête et ses pensées apparaissent en italique dans l’ouvrage.

3 secondes est aussi une critique de l’écœurant jeu de pouvoir au plus haut niveau de l’Etat, qui n’hésite pas à abandonner en chemin ses serviteurs, celle du cloisonnement du travail des services de police et de justice.

J’aime les romans d’espionnage, d’infiltration minutieuse, et j’ai été tenue en haleine par le récit de la lutte entre ces diverses forces et le désir de vivre de cet homme condamné par tous. A la manière d’un scenario, les descriptions sont précises, les détails permettent au lecteur de visualiser les scènes.

Les ingrédients d’un film d’aventures et d’espionnage sont en place : un parfum de « Prison break » et de tulipes, un soupçon de « Mission impossible », la ténacité d’un Columbo ! Avec un petit faible pour l’homme traqué qui ne veut plus jamais mentir à sa famille…

PS : Le film The informer, sorti en 2019, en a été tiré, même si le pitch en est un peu différent : transposé à New York, avec un ancien agent des Forces Spéciales!

Citations

« Pendant 10 ans, il avait tellement menti à Zofia, Hugo et Rasmus et tous les autres autour de lui que, lorsque ceci serait terminé, il aurait déplacé pour toujours la frontière entre le mensonge et la réalité, c’était ainsi, il ne savait jamais où s’arrêtait le mensonge et où commençait la vérité, il ne savait plus qui il était. »

« – Tu n’iras pas plus loin. L’enquête préliminaire est au point mort. Grens, tu sais aussi bien que moi qu’il n’est pas raisonnable de mobiliser autant de moyens pour une enquête qui n’avance pas.

⁃ Je ne lâche jamais un meurtre.

Ils se regardèrent. Ils venaient de deux mondes différents.

– Bon… Qu’est-ce que tu as, alors ?

– Dans une enquête pour meurtres, Ågastam, on ne réduit pas le degré de priorité. Les meurtres, on les résout.»